Quelle destinée insolite réservée aux pensées néfastes ! Certaines sont refoulées sous terre, pensant être éliminées. Cependant, elles peuvent parfois se propager souterrainement, à la manière d’une fouine, avant de resurgir soudainement, et souvent pour le pire. C’est précisément le cas de la résurgence de l’ombre épuisée de l’ORTF.
La récente nomination de Rachida Dati en tant que ministre de la culture a renforcé cette intention, en la présentant comme un pilier de sa future action. Le plan comprendrait la réunion de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde (qui comprend France 24 et RFI [Radio France internationale]), et l’Institut national de l’audiovisuel [INA]. Franck Riester, ancien ministre de la culture désormais en charge du commerce extérieur, avait précédemment soutenu ce projet avec enthousiasme. Malgré notre croyance que la pandémie de Covid-19 nous avait libérés de ce plan, la ministre a récemment annoncé, notamment sur France Inter, que si cette fusion se faisait promptement, un audiovisuel public unifié, « fort, robuste, préservé, » serait suivi par « l’aspect budgétaire ».
Il semblerait qu’il y a une logique douteuse en jeu, surtout si l’on examine les détails cachés. L’idée reçue que le gouvernement en place méprise l’audiovisuel public a souvent dominé les discussions depuis 2017. La décision du ministre des comptes publics en 2019, Gérald Darmanin [maintenant ministre de l’intérieur], de réduire l’impôt de soutien de l’audiovisuel public d’un euro symbolique, a été le premier indice, qui illustre parfaitement le mépris et l’audace. Par la suite, il a été annoncé la suppression totale et regrettable de cette taxe « ciblée ». Cette élimination est entourée de nombreuses promesses vides selon lesquelles l’assurance d’un financement stable ne serait pas touchée. À la lumière de ces faits, comment peut-on être convaincu qu’un mélange hétéroclite dont on parle ici modifierait de manière positive les décisions budgétaires, c’est-à-dire le cours politique ?
Rivalité des ambitions de pouvoir
Il est certain que pousser ces entreprises distinctes à coordonner leurs efforts pour des projets innovants est une bonne chose. L’intervention du gouvernement dans ces discussions, en particulier lors des négociations autour des « contrats d’objectifs et de moyens », est tout à fait appropriée. Cependant, en l’occurrence, il ne s’agit pas de cela, mais d’une fusion substantielle qui nous renvoie à l’ère préhistorique de l’immense ORTF où les gouvernements contrôlaient de près les programmes et les informations.
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