Wilfried Romain est un chef reconnu qui, pendant son temps libre, se plaît à escalader des volcans. Il a déjà réalisé une douzaine de ces ascensions impressionnantes, dont celle du Mont Bromo situé à l’est de Java, une exploitation qui reste gravée sur son biceps droit. Sa biographie Instagram le décrit comme un « chef en éruption », ce qui est confirmé par son parcours qui l’a mené à travailler chez Boragó, au Chili, établissement reconnu comme l’un des meilleurs restaurants du monde d’après le classement des 50 Best. Depuis mars, il codirige, avec le sommelier Rémi Badjoint, Lava, une établissement situé dans le 5ème arrondissement de Paris, à la fois restaurant et bar à vins.
L’idée principale de Lava est le monde des volcans, thème qui influence à la fois la préparation des plats et la décoration des lieux. L’extérieur aux teintes cendrées donne le ton. A l’intérieur, une grande salle tout en nuances de noirs, éclairée discrètement par un plancher lumineux d’époque, de multiples miroirs et des luminaires suspendus de couleur anthracite.
Le comptoir élégamment sombre et le style de la salle évoquent l’ambiance des bodegas péruviennes. C’est là que Wilfried Romain a découvert le ceviche, spécialité péruvienne de poisson cuit à froid par l’acidité de son marinade traditionnelle nommée le « leche de tigre ». Il a lui-même admis qu’il pensait, comme beaucoup de Français, qu’il s’agissait de poisson cru mariné au citron. C’est de cette découverte qu’est né son plat signature, le « black ceviche », une saveur d’ailleurs.
Ce plat de poisson blanc, fidèle au thème choisi par le chef, adopte une couleur noir intense ici. « Je souhaitais que le repas soit une expérience intrigante, presque comme manger les yeux fermés, » déclare-t-il. Le cuisinier dépose d’abord dans un bol profond, dont le ton sombre et la texture brillante rappellent l’ardoise, une crème de riz à la saveur douce et onctueuse de sésame noir et de miso. Il invite les convives à la déguster jusqu’à la dernière goutte, quitte à demander une seconde tranche de pain chaud si nécessaire. Le véritable sujet du repas – le ceviche – est dévoilé une fois que les tuiles en encre de seiche, qui recouvrent le milieu du plat, sont croquées.
« Nous utilisons du lieu ikejime [une méthode d’abattage qui implique la mise à mort de l’animal dès qu’il est pêché], que nous marinons dans du leche de tigre, un jus légèrement piquant et acidulé, mêlé de piment, d’ail, de gingembre, de coriandre, de citronnelle et d’un bouillon de poisson » explique le chef. Cette combinaison donne aux saveurs marines apportées par le lieu ultra-frais la dimension exotique tant appréciée par ce « cuisinier globe-trotter ».
L’influence étrangère est amplifiée par l’ajout de quelques grains de riz noir grillé et une marmelade de citron pimenté qui joue le rôle de moutarde. « C’est le coup de grâce, celui qui apporte le dernier coup, » conclut le chef dans un langage qui révèle son passage dans l’émission « Top Chef » (saison 13).
Lava, situé au 9, rue de la Montagne-Sainte-Geneviève, Paris 5e. Le prix du Black ceviche est de 19 €.
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