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Tournant sécuritaire dans villes démocrates US

Pour plusieurs années, Portland, qui est le centre financier de l’Oregon, a été ciblée, tout comme San Francisco en Californie, par les Républicains qui critiquent sa politique juridique perçue comme excessivement libérale. À quelques mois seulement d’une élection présidentielle dominée par des questions de sécurité, les démocrates locaux ont récemment fourni des motifs de réjouissance aux conservateurs américains.

Le 1er avril, la gouverneure Tina Kotek a signé une loi qui réintroduit la criminalisation de la possession de drogues dures, annulant la décriminalisation qui avait été plébiscitée par plus de 58% de l’électorat de l’état en novembre 2020, dans le contexte des manifestations contre le racisme. « La politique non punitive a manqué son but », a avoué le maire démocrate de Portland, Ted Wheeler. Cette déclaration a offert des munitions aux Républicains, qui ont privilégié le thème de la sécurité – en particulier à la frontière mexicaine, où ils associent souvent le crime à l’immigration – comme principal argument pour l’élection du 5 novembre.

La décriminalisation de 2020 en Oregon – une action jusqu’à présent inédite aux États-Unis – avait été saluée comme le précurseur d’une nouvelle vision. L’Amérique reconnaissait l’échec de la « guerre contre la drogue » initiée par Richard Nixon en juin 1971. Que ce soit parmi les Démocrates ou les Républicains, nombreux sont ceux qui étaient réceptifs à l’argument avancé depuis des années par les penseurs Afro-américains : l’approche tout répressive a conduit à un « emprisonnement de masse », affectant de manière démesurée les jeunes Noirs.

« C’était une mauvaise idée ».

La législation adoptée en 2020 limitait les amendes à 100 dollars pour la possession de drogues comme la méthamphétamine, l’héroïne et le fentanyl, tout en approuvant le développement d’un programme de réhabilitation. Celui-ci était financé par les taxes des ventes de cannabis et les économies réalisées sur le budget pénitentiaire. Lors des arrestations, les forces de l’ordre étaient supposées fournir aux toxicomanes les coordonnées pour un centre de traitement et les informer que leur amende serait supprimée s’ils contactaient le centre. Au bout de quinze mois, seulement 119 personnes avaient utilisé ce service. Pas une seule amende ne fut payée. Le coût de fonctionnement pour la ligne d’aide représentait 7 000 dollars par appel.

La réaction ne s’est pas faite attendre. À la fin de 2023, des personnalités du monde des affaires, dont Phil Knight, co-fondateur de Nike, un des fleurons de l’Oregon, ont investi 700 000 dollars dans une campagne visant à recriminaliser la possession de drogue. Les démocrates ont également appuyé cette cause. En mars, les représentants à l’Assemblée et au Sénat locaux ont largement soutenu la réforme. La nouvelle loi continue de privilégier un traitement de désintoxication, mais elle réinstaure aussi des peines de prison, allant jusqu’à dix-huit mois.

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