L’armée birmane s’est complètement retirée de Myawaddy, une ville frontalière essentielle pour le commerce avec la Thaïlande, marquant une autre défaite majeure pour l’armée en difficulté, qui a connu plusieurs revers dans le nord et l’ouest du pays ces derniers mois. Il s’agit d’un revers significatif pour la junte birmane, étant donné que le commerce passant par Myawaddy a amassé 1,1 milliard de dollars ces douze derniers mois, une somme vitale pour l’armée birmane en manque de finances, d’après le Ministère du commerce birman.
Padoh Saw Taw Nee, porte-parole de l’Union nationale karen (KNU), un des principaux groupes rebelles opposés à la junte, a confirmé jeudi 11 avril à l’Agence France-Presse (AFP) qu’ils ont pris le contrôle de la ville : « Nous avons pris [le bataillon militaire de Birmanie] 275 à 22 heures hier soir ». Il a ajouté que près de deux cents soldats se sont retranchés sur un pont reliant Myawaddy à la ville frontalière thaïlandaise de Mae Sot.
Un officiel des services d’immigration thaïlandais, qui a requis l’anonymat car il n’était pas autorisé à parler à la presse, a confirmé à l’AFP que Myawaddy était « tombée » dans la nuit de mercredi à jeudi. Les journalistes de l’AFP présents à la frontière ont entendu un bruit sourd du côté birman après le passage d’un avion à environ 10h30, heure locale (5h30 à Paris), jeudi.
D’après des résidents locaux, les hostilités ont débuté mardi près de Myawaddy, et à partir de mercredi soir, il n’y a pas eu de signes de conflit. Un résident de Myawaddy a confirmé à l’AFP que les affrontements s’étaient terminés environ 20 heures la veille. Les allégations de la KNU ne peuvent être vérifiées indépendamment par l’AFP, puisque les journalistes n’ont pas accès à Myawaddy.
La junte subit des revers à répétition.
Mercredi, des centaines d’individus effrayés se sont alignés à la frontière dans le but de fuir les hostilités qui ont éclaté durant plusieurs jours près de Myawaddy. La Thaïlande possède une frontière de 2 400 kilomètres avec la Birmanie, qui a été le théâtre d’un coup d’État militaire dirigé contre le gouvernement démocratiquement élu d’Aung San Suu Kyi en 2021, réactivant ainsi la dispute entre la junte et ses adversaires ethniques et politiques.
La junte a essuyé un certain nombre de défaites depuis quelques mois dans le nord et l’ouest du pays. Selon un responsable de l’immigration, le nombre de personnes traversant la frontière thaïlandaise en provenance de Birmanie chaque jour s’est élevé à environ quatre mille ces derniers jours, par rapport à mille neuf cents en temps normal.
Il a également souligné que les autorités augmentaient le nombre d’agents d’immigration pour préparer une éventuelle augmentation des arrivées. Mercredi soir, le lieutenant général Prasarn Saengsirirak, commandant de la 3e armée thaïlandaise, a déclaré aux médias locaux que l’armée était en train de renforcer ses patrouilles le long de la frontière.
Le Premier ministre de la Thaïlande, Srettha Thavisin, a mis en garde que son pays répondra avec soit des mesures douces soit des réponses plus sévères si des tirs se dispersent jusqu’à leur territoire. Il a tenu une discussion avec son cabinet au début de la semaine au sujet de la situation frontalière. Par ailleurs, le Ministre des Affaires Étrangères a déclaré mardi que la Thaïlande est préparée à recevoir jusqu’à cent mille réfugiés fuyant la guerre en cours. Tout en offrant cette assistance, la Thaïlande continuera à fournir également de l’aide humanitaire.