Il s’agit du récit d’un groupe de retraitées déterminées, devenues militantes suite à leur frustration face à l’apathie en matière environnementale des responsables de leur pays. Leur mécontentement a donné naissance à un mouvement citoyen de 2 500 membres, qui, à la surprise générale, a obtenu une victoire retentissante devant la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg (CEDH). Celle-ci a condamné la Suisse pour violation de la Convention européenne des droits de l’homme le mardi 9 avril. Poursuivant leur action pendant près de neuf ans malgré les moqueries qu’elles ont parfois dû subir, ces « aînées pour le climat » ont pu affirmer leur résolution.
Peu de temps avant la décision de la CEDH, les médias allemands ont critiqué ces femmes, accusées d’être « des marionnettes manipulées par les extrémistes de Greenpeace », peut-être une manière de prévoir un jugement percevant comme une gifle justifiée pour le gouvernement de Berne par un tiers de la classe politique Suisse, et un scandale pour le reste.
Alors qu’elle se trouvait à Vienne aux côtés de son homologue autrichien, Alexander Van der Bellen, la présidente en exercice de la Confédération, Viola Amherd (Le centre), s’est dite « surprise par le jugement. Le développement durable, la biodiversité et l’objectif zéro net [émission de gaz à effet de serre] sont cruciaux pour [notre] pays ». Troublée par cette décision, qui met en lumière une certaine passivité environnementale des autorités, elle a annoncé « attendre avec impatience les motivations de la décision de la Cour européenne ».
Dans la moyenne européenne.
Les réactions du monde politique ont été très prononcées en ce qui concerne les récentes évolutions juridiques. Lisa Mazzone, nouvelle présidente des Verts, est très enthousiaste à l’idée que la Suisse est en première ligne de cette transformation législative à travers l’Europe. Mazzone considère ce mouvement comme une victoire significative, comparable à l’Accord de Paris sur le climat. Selon elle, la décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) marque un tournant historique en instaurant un droit fondamental à un environnement sain, et c’est à l’État de veiller à sa protection.
Dans la pratique, cela signifie que l’État suisse devra désormais travailler à aligner ses mesures en matière de climat avec les objectifs définis. Malheureusement, ce n’est pas encore le cas. Selon l’indice de performance climatique 2024 de l’organisation allemande Germanwatch, la Suisse est seulement classée 21e en termes d’efforts pour faire face à l’urgence climatique. Elle se situe dans la moyenne européenne, mais derrière l’Allemagne (14e), les pays scandinaves (Norvège, Suède, Danemark) et d’autres nations qui ont accéléré leur transition en investissant dans les énergies renouvelables.
Le contexte suisse est particulier car le déploiement des énergies renouvelables y est complexe en raison du droit d’opposition qui commence au niveau municipal. Raphaël Mahaim, l’un des cinq avocats présentant le cas de l’association Aînées pour le climat devant la CEDH, insiste sur le fait qu’un pays aussi riche et développé, avec les meilleures écoles et technologies, doit servir de modèle et prendre le rôle de pionnier au lieu de stagner dans la moyenne. Pour Mahaim, également membre du parlement suisse pour le canton de Vaud, il est impératif que la Suisse réussisse dans cette lutte pour le climat. Il se questionne, « si ce n’est pas la Suisse qui réussira, qui le fera? »
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