Le projet de loi tant attendu sur le droit à la mort sera présenté au conseil des ministres ce mercredi 10 avril, avant d’être examiné par l’Assemblée nationale le 27 mai. Catherine Vautrin, la ministre du travail, de la santé et des solidarités, a révélé au Monde les principales éléments d’un autre aspect très anticipé de ce projet de loi : l’assistance, soit les soins palliatifs et la gestion de la douleur.
Le gouvernement a promis d’augmenter l’accessibilité aux soins palliatifs, en investissant un supplément de 1.1 milliards d’euros sur une période de dix ans. « En 2034, nous dépenserons 2.7 milliards d’euros, ce qui est 1.1 milliards de plus que maintenant », a annoncé la ministre. Elle précise que « Cela se concrétisera par de nouvelles initiatives, financées à coups de 100 millions d’euros annuellement sur une durée de dix ans. » Le gouvernement a également pour objectif que d’ici 2025, toutes les régions disposent d’une unité de soins palliatifs, alors que vingt ont toujours l’absence d’une unité, selon les dires de Mme Vautrin. Pendant que cette stratégie décennale est en attente de publication, une note ministérielle en vue de mieux organiser ces soins a été diffusée en juin 2023 par le département de la santé.
En France, l’urgence de la situation en matière de soins palliatifs est réelle. Face à l’augmentation de l’âge moyen de sa population, le pays peine à atteindre les objectifs nécessaires. La convention citoyenne sur la fin de vie avait relevé cette insuffisance. D’après la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), seul un patient sur trois nécessitant des soins palliatifs y a accès en France. Ceci est principalement dû à une distribution inégale des établissements spécialisés à travers le pays, un manque de personnels soignants et une identification difficile de la culture palliative par la société et le personnel médical.
Cependant, le nombre de soins palliatifs a connu une augmentation considérable ces deux dernières décennies en raison de plans nationaux instaurés depuis 1999. La version la plus récente de l’Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie en France, parue en 2023, révélait la présence de 7 546 lits dédiés aux soins palliatifs à l’hôpital, soit 11,1 lits pour 100 000 habitants, fin 2021, par rapport à 4 012 lits en 2007.
La grande majorité de ces lits (5 566), connus sous le nom de « lits identifiés de soins palliatifs » (LISP), se trouve dans les hôpitaux au cœur des services confrontés à la fin de vie, notamment oncologie, gériatrie, cardiologie, etc., et ne sont pas exclusivement utilisés pour les soins palliatifs.
Les lits restants sont associés à des « unités de soins palliatifs » (USP), des centres de référence qui prennent en charge les patients dont la situation médicale est complexe et requiert des soins hospitaliers spécialisés. Le nombre de ces structures spécialisées a pratiquement doublé entre 2006 et 2021.
Au cours des deux dernières décennies, on a observé une croissance de 20% du nombre d' »équipes mobiles de soins palliatifs » (EMSP), qui est passé de 350 en 2007 à 420 en 2021. Celles-ci sont constituées de professionnels de diverses sphères (médecins, infirmiers, psychologues, etc.) et aident les équipes médicales d’un ou plusieurs établissements à assurer un suivi des patients en phase terminale. Elles ont également la capacité d’offrir des soins à domicile, aux côtés du patient.
Malgré des améliorations notoires depuis le debut des années 2000, des disparités régionales demeurent. Un rapport du Sénat publié en 2021 a souligné ce point, corroborant les conclusions de l’Inspection Générale des Affaires Sociales. Cette dernière avait constaté en 2019 un ralentissement de la progression des quatre premiers plans et l’existence continue de plusieurs questions complexes non résolues, principalement liées au contexte du système de santé. Elle avait également relevé l’absence persistante d’une couverture territoriale juste et équitable.
En effet, l’offre en soins palliatifs est répartie de façon inégale sur le territoire français. Bien que la plupart des départements disposent d’unités spécialisées dans ces soins, vingt-et-un n’en avaient toujours pas en 2021. Selon les précisions du Ministère de la Santé, ce chiffre est descendu à vingt départements en décembre 2023.
La Dr. Ségolène Perruchio, à la tête du service de soins palliatifs du Centre Hospitalier Rives-de-Seine à Puteaux (Hauts-de-Seine), déplore la lacune majeure dans la disponibilité des structures de soins palliatifs. Elle pointe que cette insuffisance est très dommageable, notamment dans le cas des patients en phase terminale qui ne peuvent pas et ne devraient pas avoir à parcourir de longues distances pour obtenir des soins essentiels. Cela est particulièrement crucial dans des régions comme le Cher, l’Indre et l’Eure-et-Loir où la désertification médicale pose une problématique majeure.
En surcroît, l’attribution des lits dédiés aux soins palliatifs dans les hôpitaux est également disproportionnée. Globalement, la France dispose en moyenne de 8,2 lits pour 100 000 habitants. Cependant, 27 départements ne disposent en moyenne que de 6,5 lits. Les régions d’outre-mer tels que la Martinique, La Réunion et la Guyane affichent des chiffres encore plus bas, avec moins de 3,5 lits pour 100 000 habitants. Mayotte, quant à lui, ne dispose d’aucun lit.
Cependant, c’est encourageant de voir que dans la plupart des départements manquant d’unités spécialisées, l’approvisionnement en lits de soins palliatifs est assez suffisant. Le Gers, par exemple, dispose d’un ratio impressionnant de plus de 11,3 lits pour 100 000 habitants.
Les conclusions du rapport sénatorial révèlent que la «compensation» envisagée dans le système de soins palliatifs à travers le territoire est loin d’être suffisante. Il y a une disparité notée dans la gestion des patients, la qualité des soins offerts et l’approche palliative des soignants, qui ne sont pas à la hauteur de celles des unités spécialisées. Comme l’explique Ségolène Perruchio, les soins varient d’un établissement à l’autre. De plus, de nombreux établissements utilisent les fonds pour pallier à leurs lacunes financières sans mettre en place de mesures concrètes, tandis que d’autres établissements fournissent un effort herculéen avec des ressources limitées pour assurer un bon service aux patients.
Les insuffisances en personnel soignant dans les structures de soins palliatifs constituent une autre entrave à une bonne gestion des patients en fin de vie. Cela a été reconnu par le ministère de la santé en 2021, en indiquant qu’il y a une pénurie de personnel médical avec 150 postes vacants et un quart des médecins en soins palliatifs sur le point de quitter leurs postes dans les cinq prochaines années. Il est à noter que les médecins ayant une expertise dans les soins palliatifs ne représentent que 2% des cliniciens hospitaliers. Même dans les établissements pour les personnes âgées en perte d’autonomie (Ehpad), seuls 15% des médecins coordinateurs possèdent une qualification universitaire spécialisée en soins palliatifs.
D’après les statistiques de 2019, dans un service spécialisé, on comptait en moyenne pour 10 lits, 1,6 docteur, 0,5 responsable de santé, 7,2 infirmières, 0,5 psychologue et 6,8 aides-soignant, ce qui représente une différence de 30% par rapport aux nombres préconisés par la dernière circulaire du ministère de la Santé. La pénurie affecte également les équipes mobiles de soins palliatifs.
Le rapport sénatorial indique que ces conditions de travail restreignent la capacité des équipes spécialisées à assumer de nouveaux patients ou les forcent à fournir un suivi inférieur. Pour Ségolène Perruchio, la fragilité de l’offre de soins palliatifs reflète le déclin de l’offre de soin en général.
Les spécialistes s’accordent à dire que, au-delà de la volonté politique et des ressources, c’est la perception de la médecine palliative qui doit être modifiée d’abord au sein du corps médical, puis plus largement dans la société.
La médecine palliative, souvent considérée comme opposée à la médecine curative, est mal vue par les professionnels de santé ; la mort est encore perçue comme un échec de traitement. Giovanna Marsico, directrice du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, déplore: « En France, nous avons des diplômes universitaires, mais nous n’avons pas de chaire ou de cours spécifiquement dédiés à la médecine palliative comme dans d’autres pays ». Ségolène Perruchio exprime également ses regrets, notant que les étudiants en médecine sont confrontés trop tard et pas assez longtemps à la médecine palliative, ce qui limite leur sensibilisation à son importance.
Les experts soutiennent fermement l’intégration des soins palliatifs dans le programme d’études pour les étudiants en médecine. Ils croient que cela aidera à développer une réelle compréhension et appreciation pour les soins palliatifs parmi la prochaine génération de professionnels de santé.
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