Dans une vidéo d’environ dix minutes, un couple de quinquagénaires de la Drôme, arrêté près de Dunkerque (Nord) pour un contrôle de police en voiture le 1er avril, refuse obstinément de se conformer aux instructions des officiers. « Je ne suis plus membre de l’entreprise Présidence de la République française. En effet, elle est une entreprise privée depuis 1948. De plus, vous êtes tous enregistrés à Washington DC avec un numéro d’identification, faisant de vous des mercenaires sur le sol français », argue le couple, une affirmation pour le moins excentrique.
Pierre et Laëtitia articulent leur singulier discours avec une assurance inébranlable, arguant que « La départementale est une voie privée ». Tout en encourageant les agents à « pousser leurs recherches », l’homme dévoile son nom de famille (« de la famille L. par rumeur, en lettres minuscules s’il vous plaît, car nous ne sommes pas des entreprises ») tandis que lui et sa femme répètent à plusieurs reprises : « Je n’ai pas de contrat, je ne contracte pas avec une entreprise privée ».
La vidéo, diffusée par Vincent Flibustier, un influenceur belge impliqué dans la lutte contre les théories du complot, a été vue environ neuf millions de fois sur X et a suscité de nombreuses railleries.
Au coeur des sarcasmes, une situation notoire mais alarmante apparaît : celle des « individus souverains ». Selon le Southern Poverty Law Center, une ONG américaine, cette collective antisystème, qui se considère au-dessus des lois et obligations nationales, est susceptible de se lancer dans « des actions illégales et violentes ». En France, le mouvement compte plusieurs milliers de membres. Par exemple, le groupe « fraude du nom légal » recense environ 20 000 inscrits sur Telegram. Une autre chaîne, la Cour de Droit Common Law (CLC) affiche quant à elle 3 000 abonnés, contre 500 seulement en avril 2023.
Cette communauté, dont l’idéologie est au croisement de l’antifédéralisme, de la résistance fiscale, du conspirationnisme et du pseudo-légalisme – soit la propension à respecter des lois fictives considérées comme supérieures au droit courant -, s’est développée aux États-Unis durant les années 1970. Leur croyance centrale est que les États n’ont aucune véritable existence juridique, mais sont plutôt des entreprises privées inscrites à Washington.
D’après cette doctrine, chaque individu est inscrit à sa naissance comme une « fiducie », sans son consentement. Il est ainsi « volé » à ses parents, trompés lors de la signature de l’acte de naissance, et devient une succursale de l’entreprise « État ». D’où l’expression « fraude du nom de naissance », souvent entendue dans leurs discussions.
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