Sous la houlette de leur direction, plusieurs employés du groupe Seb sont descendus en force près de l’Assemblée nationale le mercredi 3 avril à Paris. Leur revendication était claire : l’abandon du projet de loi visant à interdire les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), qui était sur le point d’être débattu en plénière. Les pancartes qu’ils brandissaient proclamaient : « Ne touchez pas à ma casserole ».
Cette proposition de loi, initiée par le député écologiste de Gironde Nicolas Thierry, prévoit l’interdiction des « polluants éternels » dans les matériaux de cuisson à partir de 2026. Ces substances, que l’on retrouve par exemple dans le célèbre revêtement antiadhésif Teflon, sont hautement consommatrices (et productrices) de PFAS. Tefal, entreprise bien connue dans le monde entier, extrait ces substances pour ses produits.
« L’acronyme détourné de ces produits chimiques hautement toxiques et résistants à l’environnement est sur mon slogan: «Protégeons la production française» », insiste Damien Ferrari, âgé de 28 ans, qui travaille comme cariste à Tefal à Rumilly, en Haute-Savoie. Selon lui, cette loi menace leurs emplois : « Nous sommes opposés à cette loi car elle va supprimer notre travail. Depuis un demi-siècle, nos produits sont contrôlés et n’ont jamais posé de problèmes aux consommateurs. »
Le spectre des « 3 000 emplois » en danger plane comme une ombre rouge sur cette mobilisation.
Dans une entrevue avec La Tribune le 31 mars, Thierry de La Tour d’Artaise, le chef de Seb, a mis en garde que le projet de loi menace 3 000 emplois. En soutien à ses employés, le PDG a organisé une journée de protestation à Paris, offrant un jour de congé et affrétant des bus pour permettre à ses employés de participer à la manifestation qui a vu un concert de poêles Tefal. On y a également aperçu quelques écharpes drapeaux français, dont celle portée par Christian Dulac, le maire de Rumilly en Haute-Savoie. Élu en novembre 2023, Dulac a souligné que Tefal représente 3 000 emplois directs et indirects, et a soutenu que la survie de sa ville dépend de la préservation de ces emplois.
En automne 2022, son prédécesseur a été contraint de fermer deux stations de distribution d’eau potable alimentant 12 000 de ses 16 000 résidents à cause des niveaux élevés de PFOA, un « polluant éternel » et cancérigène, longtemps utilisé par Tefal dans la fabrication de son Teflon.
Toutefois, le président de Seb insiste sur le fait que les produits Tefal, tout comme tous ceux fabriqués par Seb, ne contiennent pas de PFAS jugés nuisibles pour la santé ou l’environnement par les autorités de santé. Cette déclaration a provoqué l’indignation de la communauté scientifique, avec plusieurs chercheurs et toxicologues dénonçant une manipulation frauduleuse et dangereuse des données scientifiques dans un article du Monde.
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