« S’il est reconnu que toute personne consciente de sa séropositivité met en jeu sa responsabilité pénale en ayant des relations sexuelles non protégées avec un individu séronégatif, quid de ce dernier? D’après le Conseil national du sida (CNS), dans son avis sur la pénalisation de la transmission sexuelle du VIH daté au 27 avril 2006, la prévention repose avant tout sur l’implication personnelle de chaque individu. Ainsi, comme une personne infectée par le VIH se doit de ne pas propager le virus, il est également du devoir de l’individu non infecté de se prémunir contre le VIH lors d’une nouvelle relation.
Sous cet angle, peut-on reprocher à une personne infectée, qui n’a pas insisté sur l’utilisation d’un préservatif, une défaillance qui pourrait réduire son indemnisation par un juge civil? C’est la question soulevée par l’affaire citer ci-dessous.
En 2007, la jeune femme Mme X, 27 ans, passe ses vacances chez sa mère dans le Sud de la France, où elle fait la connaissance de M. Y. Celui-ci est séropositif depuis 1997, une information qu’il lui dissimule. Ils ont des rapports sexuels sans protection.
Un mois plus tard, Mme X commence à manifester les symptômes d’une primo-infection par le VIH (fièvre intense et diarrhées) nécessitant une hospitalisation. Elle découvre alors sa séropositivité et doit commencer un traitement antirétroviral qui génère des effets secondaires significatifs, comme une fatigue extrême. En 2011, elle devient inapte à exercer son métier d’aide à domicile.
Prescription »
C’est seulement durant cette année précise que Madame X a déposé une plainte à l’encontre de Monsieur Y. Cependant, elle s’est trouvée face à une obstacle juridique dû à la limite de temps pour pouvoir porter plainte qui était, à l’époque, de trois ans après l’incident (la durée a été prolongée à six ans suite à l’application de la loi n° 2017-242 le 27 février 2017). En 2016, elle a entamé une procédure civile, la prescription pour la réparation de dommage corporel étant, conformément à l’article 2226 du code civil, de « dix ans après la date de la consolidation » (stabilisation), qui s’est produite pour elle en avril 2015.
En première instance, Monsieur Y a été reconnu coupable et a dû lui payer une somme de 93 285 euros (pour couvrir l’incidence professionnelle, le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, et le déficit fonctionnel permanent). Il a également dû payer à la caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) un montant de 398 821 euros pour les frais médicaux présents et futurs de Madame X.
Cependant, il a fait appel, en soutenant l’avis du CNS. Il a argumenté que Madame X a « commit une erreur en ne se protégeant pas avec un préservatif », et que cette erreur « l’exonère totalement de sa responsabilité ».
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