C’était en octobre 2022, à l’âge de 28 ans, sur la table d’opération d’un hôpital néerlandais, que l’on m’a annoncé pour la première fois que je ne pourrais plus marcher. Mes membres étaient engourdis, mon corps entier crucial ne répondait plus à aucune stimulus, ni chaleur, ni froid. Tout ce que j’entendais était la déclaration du chirurgien. Je ne pouvais pas croire que c’était réel, je criais dans mon incapacité physique. Puis, un anesthésiste s’est approché de moi pour me plonger doucement dans l’inconscience. Juste avant de perdre conscience, j’avais pour dernier recours le déni : Non ! Je ne veux pas que ma passion me coûte mon indépendance et me confine à un fauteuil roulant pour le reste de mes jours. Non ! Ce ne peut pas être réel, non ! Non !
Je suis Tifany Huot-Marchand. Avant ce jour fatidique de l’automne, je m’étais distinguée comme olympienne en short-track, pratique du patinage de vitesse sur piste courte. Je suis née en 1994 à Besançon, avec ma sœur jumelle, Manon. Nos parents travailleurs nous ont élevés, ainsi que mes deux frères, dans le petit village de Nans, dans le Doubs. Le village ne disposait ni d’école ni de magasins. Chaque jour, matin et soir, les enfants du village montaient à bord de l’autobus scolaire pour se rendre à l’école de Cuse-et-Adrisans ou au collège de Rougemont.
Dans ma jeunesse sportive, je m’adonnais seulement aux activités fournies par l’école ou j’aimais bien pédaler le long de la rue principale de Nans. Aucune circonstance alors ne me destinais au patinage. Alors que j’avais moins de 10 ans, une voisine récemment arrivée choisit de vivre dans notre village. Originaire de Chamonix, elle a continué sa vie en Franche-Comté, apportant avec elle une passion pour le patin à glace héritée de la Haute-Savoie. Elle a décidé d’emmener ses enfants à une piste de short-track à Belfort, à une heure de Nans. Et tant qu’à faire le trajet, pourquoi ne pas également inviter les enfants des voisins? Ma sœur et moi avons donc été incluses.
« Nous pratiquons, nous tombons, et nous améliorons. »
Nous n’avions jamais patiné auparavant, mais nous y avons pris goût immédiatement. Nous avons commencé par des chutes puis nous avons été captivées par le glissement et le frisson du contact avec la glace. En peu de temps, nous nous sommes retrouvées en compétition. Tous les week-ends, nous nous rendions à des rencontres sportives avec d’autres enfants de notre âge, escortées par nos parents. L’atmosphère était conviviale et nous nous sentions à notre place. Malgré la nécessité de voyager deux heures pour aller à l’entraînement et revenir – à deux reprises chaque semaine – nous étions déterminées! Nous pratiquions assidûment, nous tombions, et nous nous améliorions.
J’étais un peu téméraire, pour ne pas dire plus. Dans notre village, il y avait une pente d’un kilomètre assez raide. Nous aimions bien monter cette colline aux rollers pour ensuite dévaler à pleine vitesse! J’ai souvent terminé hors-piste, une fois même dans un fossé. Cependant, je n’ai jamais été blessée de manière significative.
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