Dans une discussion avec le Time Magazine en septembre, un représentant de Volodymyr Zelensky a admis que bien que l’Ukraine reçoive toutes les armes promises par ses alliés, la nation manque de troupes pour les mettre en œuvre. À l’automne, l’armée ukrainienne, épuisée et grandement diminuée, avait un besoin criant de nouveaux soldats autant que de munitions, simplement pour maintenir ses positions. La nécessité de mobiliser plus de forces est une réalité acceptée par les hauts commandements militaires, la société civile et le monde politique, bien qu’elle soit un point de contention, comme le démontrent les hésitations du gouvernement et la lenteur des débats au Parlement.
Deux années après l’invasion russe, la ferveur patriotique qui avait augmenté les rangs de l’armée ukrainienne de 260 000 à 700 000 hommes s’est estompée et le recrutement devient difficile. Le nombre élevé de pertes militaires, estimé à 31 000 par Volodymyr Zelensky fin février et à 70 000 morts et 120 000 blessés par le New York Times en août, a fortement découragé les ardeurs, de même que le point mort sur le front. Il y a peu de volontaires prêts à passer des mois dans les tranchées sans autre but que de résister aux attaques d’une armée russe mieux pourvue, dont les rangs semblent, si pas inépuisables, du moins nettement supérieurs.
Au mois d’août, Oleksii Reznikov, qui était à l’époque ministre de la défense, affirmait qu’il n’était pas nécessaire de mobiliser davantage de troupes et plaidait simplement pour une optimisation du processus de recrutement. Cependant, une pénurie est devenue évidente vers la fin de l’été. « Voilà pourquoi, à partir de septembre-octobre 2023, les brigades du groupe Tavria [déployées sur le front de l’Est] n’étaient plus en mesure de maintenir leur offensive et ne pouvaient que se défendre », déclare le Center for Eastern Studies (CES) de Varsovie, dans un rapport consacré à la question.
Désordre et corruption
A ce manque de troupes s’ajoute l’usure des soldats sur le terrain depuis deux ans, qui, faute de renforts, restent de façon prolongée sur le front. « Il n’est pas inhabituel que les pelotons ne soient constitués que de quelques soldats et que les compagnies ne comptent pas plus de 50 individus (soit moins de la moitié de leur effectif total). D’après le règlement, cela devrait entraîner leur retrait automatique. Dans l’état actuel du front, ces sous-unités ne peuvent généralement pas être remplacées. Les commandants sont obligés d’exiger que leurs subordonnés restent en poste plus longtemps, réduisant ainsi le temps consacré au sommeil, à la nourriture et à l’hygiène de base », note le CES.
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