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31 mars 2024 1 h 06 min

Paris fournit blindés et missiles à Kiev

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Comment les drones sont-ils exploités par Moscou et Kiev ?
La bataille des drones entre la Russie et l’Ukraine a pris une dimension sans précédent ces derniers mois. Selon un rapport publié en mai 2023 par un groupe de réflexion britannique spécialisé dans les aspects de défense, les Ukrainiens perdent environ 10 000 drones par mois sur le terrain de guerre, soit plus de 300 par jour. En comparaison, l’armée française possède légèrement plus de 3 000 avions non habités dans ses stocks.

Les ukrainiens et les russes recourent principalement à l’utilisation de petits véhicules aériens sans pilote (UAV en anglais), généralement civils, abordables et largement disponibles. Ces appareils sont utilisés pour la surveillance des champs de bataille et pour diriger les troupes ou les tirs d’artillerie. De plus, certains sont modifiés pour transporter de petites charges explosives, qui sont ensuite larguées sur des tranchées ou des véhicules blindés.

Les drones kamikazes, bien que moins répandus, jouent également un rôle essentiel. Équipés d’explosifs, ces UAV sont dépêchés au-dessus de la ligne de front sans objectif prédéfini. Moscou utilise des drones russes Lancet-3, ainsi que des Shahed-136, de fabrication iranienne. L’Ukraine, qui ne possède pas une véritable flotte de guerre, défie l’ennemi avec des véhicules marins sans pilote, de petits kayaks téléguidés et chargés d’explosifs (450 kilos de TNT).

Considérant l’importance cruciale des drones pour leurs opérations, aussi bien ukrainiens que russes ont pris des dispositions pour garantir un approvisionnement durable pour leurs troupes, non seulement en achetant massivement des drones civils sur le marché, mais aussi en développant leurs propres capacités de production. L’industrie nationale ukrainienne, qui était à ses débuts au commencement de la guerre du Donbass il y a dix ans, a connu une progression considérable. À la fin d’août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé qu’un modèle copié du drone russe Lancet allait être finalisé et bientôt déployé sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.

L’accès aux composants électroniques de la Russie est entravé par les sanctions occidentales, mettant ainsi le pays en difficulté. Néanmoins, d’après les services de renseignement américains, la Russie aurait entamé la construction d’une usine dans la zone économique spéciale d’Alabouga. La fonction de cette usine serait de produire des drones kamikazes de conception iranienne, similaires aux Shahed-136.

En ce qui concerne l’armement de la Russie, il est particulièrement délicat, voire impossible, de déterminer l’état actuel de leurs stocks de missiles. Les services de renseignement ukrainiens partagent fréquemment des informations à ce sujet, mais leurs évaluations sont à prendre avec précaution.

Andri Ioussov, le porte-parole de la direction du renseignement du ministère de la défense, a indiqué à Liga.net que l’armée russe possédait 2 300 missiles balistiques ou de croisière avant le conflit et en avait encore plus de 900 au début de l’année. En plus de cela, dix mille missiles antiaériens S-300, dont la portée est d’environ 120 kilomètres, ainsi qu’un grand nombre de S-400, une version plus récente avec une portée trois fois plus grande, ont été ajoutés au décompte. En août, Vadym Skibitsky, le numéro deux du ministère de la défense, donnait le chiffre de 585 missiles ayant une portée de plus de 500 kilomètres.

Quant à la capacité de production, elle aurait augmenté pour atteindre une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois, selon plusieurs experts. En octobre, le ministère de la défense estimait cette production à 115 unités.

Selon plusieurs sources iraniennes citées par l’agence Reuters, la Russie aurait acheté des missiles de courte portée en Iran et en Corée du Nord, et continuerait d’en obtenir. Depuis janvier, où un accord a été signé, il semble que 400 missiles iraniens Fateh-110, avec une portée de 300 à 700 kilomètres, ont été livrés à la Russie. Le nombre de missiles provenant de Corée du Nord que la Russie a acquis reste indéfini. Cependant, 24 missiles ont été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général, Andriy Kostin. Les experts ayant étudié les débris et les trajectoires émettent l’hypothèse qu’il pourrait s’agir de KN-23 et KN-24, avec une portée d’environ 400 kilomètres.

Quant aux avions de combat F-16, les États-Unis ont approuvé en août 2023 le transfert de ceux-ci à l’Ukraine, répondant à une requête de longue date du président ukrainien. Bien qu’il existe une flotte potentielle de plus de 300 F-16 dans neuf pays européens – dont la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal -, tous les États possédant ces avions ne sont pas en position de les céder immédiatement.

Volodymyr Zelensky, président ukrainien, a mentionné que 42 F-16 ont été promis par les alliés occidentaux à Kiev, une information non confirmée. Le Danemark s’est engagé à fournir 19 de ces avions : les 6 premiers ne seront pas livrés avant la fin de 2023, 8 supplémentaires en 2024 et les 5 derniers en 2025, d’après Mette Frederiksen, la première ministre danoise. Les Pays-Bas, qui ont également promis des F-16, disposent de 42 unités, sans donner d’indication sur le nombre qu’ils envisagent de donner.

Concernant les avions de combat américains, les pilotes ukrainiens ont besoin de formation. Onze nations alliées de Kiev ont promis de soutenir ces pilotes. Selon les prévisions de l’OTAN, les militaires ukrainiens ne seront capables d’utiliser ces avions en combat qu’à partir du début de 2024, tandis que certains experts estiment cet usage possible vers l’été de la même année.

Quelle assistance militaire ses alliés offrent-ils à Kiev?
Deux ans après le déclenchement de la guerre à large échelle, le soutien occidental à Kiev accuse un déclin notable : l’aide nouvellement apportée est en nette diminution sur la période d’août 2023 à janvier 2024 par rapport à la même période de l’année précédente, comme l’indique le dernier rapport de l’Institut Kiel publié en février 2024. Cette tendance à la baisse risque de perdurer, étant donné la difficulté du Sénat américain à approuver des aides, de même pour l’Union Européenne qui a péniblement adopté une aide de 50 milliards le 1er février 2024, face à l’opposition hongroise. Il est à noter que ces deux aides ne sont pas incluses dans le dernier bilan de l’Institut Kiel qui s’achève en janvier 2024.

Les informations de l’institut allemand révèlent une réduction du nombre de donateurs, qui tendent à se rassembler autour d’un groupe de pays : les États-Unis, l’Allemagne, les pays du Nord et de l’Est de l’Europe, qui proposent à la fois une aide financière conséquente et des équipements militaires avancés. Au total, depuis février 2022, les pays supportant Kiev se sont engagés à contribuer au moins 276 milliards d’euros en termes d’aide militaire, financière ou humanitaire.

En termes absolus, les nations les plus prospères sont aussi les plus généreuses. Les Etats-Unis sont les principaux donateurs, annonçant une assistance de plus de 75 milliards d’euros, dont 46,3 milliards sont destinés à l’aide militaire. Les pays de l’Union européenne ont promis à la fois des aides bilatérales s’élevant à 64.86 milliards d’euros et des aides collectives tirées du budget de l’Union européenne qui s’élèvent à 93.25 milliards d’euros, soit une somme totale de 158,1 milliards d’euros.

Cependant, si l’on considère ces contributions en relation avec le produit intérieur brut (PIB) des pays donateurs, le classement varie. Les Etats-Unis se retrouvent alors à la vingtième place avec 0,32% de leur PIB. Ils sont surpassés par des pays voisins de l’Ukraine et par d’anciennes républiques soviétiques alliées. L’Estonie est en tête de liste, consacrant 3,55% de son PIB à l’aide, suivie par le Danemark (2,41%) et la Norvège (1,72%). La Lituanie (1,54%) et la Lettonie (1,15%) complètent la liste des cinq premiers. Les trois Etats baltes, tous frontaliers avec la Russie ou la Biélorussie, figurent parmi les donateurs les plus généreux depuis le début du conflit.

Dans le classement basé sur le pourcentage du PIB, la France se situe à la vingt-septième place, ayant engagé 0,07% de son PIB, juste derrière la Grèce (0,09%). L’aide fournie par la France a constamment diminué depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie: la France était en vingt-quatrième position en avril 2023 et treizième à l’été 2022.

En ce qui concerne les tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne, que savons-nous?

Depuis quelques mois, les liaisons entre l’Ukraine et la Pologne ont été tendues. Le sujet principal de cette discorde est le transport de céréales ukrainiennes. Au printemps 2022, l’Union européenne a instauré des « couloirs solidaires » pour faciliter l’exportation et la distribution de produits agricoles ukrainiens sans taxes douanières vers l’Afrique et le Moyen-Orient. Cependant, depuis le commencement du conflit, près de la moitié des céréales ukrainiennes traversent ou terminent leur voyage au sein de l’Union européenne, selon les observations de la Fondation Farm, un groupe de réflexion sur les problèmes agricoles internationaux. Ces céréales sont vendues à un prix considérablement réduit par rapport au blé cultivé dans l’UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale.

La Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont argumenté que ces céréales perturbent leur marché local et nuisent ainsi aux revenus de leurs agriculteurs. Ces pays ont donc unilatéralement bloqué leurs importations en avril 2023. Bruxelles a approuvé cet embargo, à condition qu’il ne freine pas l’acheminement vers d’autres pays et qu’il n’excède pas une durée de quatre mois. Varsovie a décidé de maintenir la fermeture de sa frontière aux céréales ukrainiennes après l’été, estimant que la question fondamentale n’avait pas été résolue, alors que Bruxelles considérait l’embargo injustifié, ses enquêtes révélant « qu’il n’y avait plus de déséquilibre dans les marchés nationaux de céréales ».

Les fermiers de Pologne ont instauré un barrage à la frontière polono-ukrainienne pour empêcher l’entrée des véhicules ukrainiens sur leur sol national. Ils revendiquent un « arrêt total » des produits ukrainiens issus de l’agriculture et de l’alimentation. Ils expriment leur mécontentement face à l’augmentation considérable de leurs frais de production, alors que leurs silos et stocks sont pleins et que les tarifs sont au niveau le plus bas. En début d’année 2024, le Chef d’Etat ukrainien indiquait que cette entrave à la frontière polonaise symbolisait « la dégradation de la solidarité » envers son pays, et a sollicité des discussions avec la Pologne. « Uniquement Moscou se complait » dans ces conflits, a-t-il déclaré, condamnant « l’émergence de slogans ouvertement favorables à Poutine ».