Sylvie Kimissa, 53 ans, consacre la majeure partie de sa semaine à des tâches ménagères à l’hôtel Ibis-Batignolles à Paris. Elle a commencé ce travail en 2013 et est une femme de ménage dévouée qui éprouve souvent une grande fatigue musculaire à la fin de sa journée de travail. Avant 2023, des inconvénients supplémentaires dus à l’utilisation régulière de produits de nettoyage rendaient sa tâche encore plus difficile. Ces produits provoquaient des irritations, des brûlures et même des étourdissements. Elle se sentait immédiatement mieux dès qu’elle quittait l’hôtel et respirait de l’air frais.
Cependant, depuis 2023, sa situation a nettement amélioré car l’entreprise de sous-traitance pour laquelle elle travaillait a modifié sa politique. Les produits nettoyants qu’elle utilise maintenant sont principalement à base de vinaigre. Sylvie Kimissa a indiqué que ce changement est clairement perceptible. Cependant, elle se demande si ces améliorations sont universelles ou dues à la nature contestataire de son lieu de travail – l’hôtel Batignolles a connu une grève de vingt-deux mois pour exiger une réduction du rythme de travail et une augmentation des salaires.
L’exposition des employés du secteur de la propreté, estimés à 600 000, aux produits de nettoyage constitue un problème de santé majeur qui reste largement ignoré. Selon François-Xavier Devetter, économiste au Centre de recherche sociologique et économique de Lille, l’attention portée à ces problèmes de santé reste minime en raison de la nature précaire et souvent sous-estimée de ce domaine professionnel, qui est souvent externalisé. Il explique que les tâches considérées comme périphériques, comme le nettoyage, sont généralement sous-traitées, laissant ainsi peu de place au suivi médical des employés.
Le danger de ces produits de nettoyage n’est pas à prendre à la légère. Des recherches scientifiques ont montré des résultats alarmants. Une étude réalisée en 2018 et publiée dans l’American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine a établi que l’exposition quotidienne à ces produits est aussi nocive pour les poumons que de fumer un paquet de cigarettes par jour. Cecilie Svanes, co-auteure de l’étude et chercheuse à l’Université de Bergen en Norvège, a affirmé que l’étude a suivi 6000 professionnels du nettoyage sur une durée de deux décennies. Elle a souligné que les résultats variaient fortement d’un individu à l’autre.
La composition chimique de ces produits de nettoyage peut être extrêmement agressive. Les détergents, désinfectants et détartrants émettent notamment des composés organiques volatils pouvant polluer l’air intérieur. Un rapport de 2021 du Haut Conseil de la santé publique révèle que 91% des produits ménagers analysés émettent du formaldéhyde, reconnu comme cancérigène par le Centre International de Recherche sur le Cancer. L’Institut national de recherche et de sécurité met également en évidence le risque d’exposition élevé à ces substances.
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