Le chef d’État polonais conservateur, Andrzej Duda, s’est montré défavorable vendredi 29 mars à un projet de loi qui vise à rendre plus facile l’accessibilité de la pilule du lendemain. Ce médicament n’était précédemment disponible que sur ordonnance à cause des restrictions imposées par l’ancien gouvernement nationaliste et populiste mené par le parti Droit et Justice (PiS).
La coalition pro-Union européenne (UE), au pouvoir depuis décembre dernier, a honoré ses engagements de campagne et a adopté un projet de loi destiné à autoriser l’accès sans entrave à la pilule du lendemain dès l’âge de 15 ans. Ce projet de loi, qui doit encore être débattu au Sénat, a été voté en faveur par 224 députés (contre 196) le 22 février.
M. Duda, un allié du PiS et un catholique pratiquant, a choisi de « renvoyer l’amendement sur la loi des produits pharmaceutiques au Parlement pour une révision », selon un communiqué de la présidence publié vendredi. Le Président a justifié sa décision par le désir de respecter les « normes de protection de la santé des enfants ».
Selon le communiqué, Andrzej Duda « ne peut pas approuver des dispositifs législatifs qui autoriseraient les enfants de moins de 18 ans à obtenir des médicaments contraceptifs sans contrôle médical et sans considérer le rôle et la responsabilité des parents ». Malgré cela, il s’est montré « ouvert à des solutions proposées par la loi concernant les femmes adultes », comme mentionné dans le communiqué.
En réponse, la vice-ministre de l’éducation nationale, Katarzyna Lubnauer, a regretté sur X que « le président se mette encore une fois à l’encontre des femmes polonaises », ajoutant que le gouvernement sait « comment gérer cette entrave ». En prévision du véto présidentiel, le gouvernement avait déjà fait savoir qu’il prévoyait de contourner cet obstacle.
La ministre de la santé, Izabela Leszczyna, a annoncé mercredi sur la radio RMF FM que nous avons établi une régulation selon laquelle la pilule sera délivrée sur ordonnance pharmaceutique. « Si nous souhaitons éviter les grossesses non planifiées chez les femmes et les jeunes filles, nous devons nous efforcer de rendre la pilule aussi accessible que possible « , a-t-elle ajouté à partir du 1er mai.
La vice-présidente de la chambre haute du Parlement, Magdalena Biejat, a également exprimé sa forte désapprobation de la décision du Président. « Les filles devraient avoir le même accès que les femmes adultes, car elles peuvent également concevoir et nous devrions les protéger contre diverses situations », a-t-elle exprimé aux médias. Elle a réitéré que l’âge du consentement sexuel en Pologne est de 15 ans. « Cela donne une raison supplémentaire pour permettre aux adolescentes de se protéger contre une grossesse non voulue », a-t-elle souligné.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la contraception d’urgence devrait être « incluse systématiquement » dans tous les programmes nationaux de planification familiale. Le débat sur la pilule du lendemain arrive en même temps que les efforts pour assouplir la législation polonaise sur l’avortement, l’une des plus restrictives en Europe.
Dans ce pays de profonde tradition catholique, l’avortement n’est actuellement légal que si la grossesse découle d’un viol ou d’un inceste, ou si elle met en danger la vie ou la santé de la mère. En 2020, la Cour constitutionnelle a soutenu le gouvernement précédent en déclarant que l’interruption de la grossesse pour malformation du fœtus était « inconstitutionnelle ».
Il y a eu plusieurs propositions de lois visant à rendre l’avortement plus libre devant le Parlement, y compris une suggestion avancée fin janvier par le parti du Premier ministre, Donald Tusk. Ce projet de loi propose de légaliser l’interruption de grossesse jusqu’à la douzième semaine et même plus tard, dans le cas d’anomalies graves du fœtus, de grossesse résultant d’un viol ou de danger pour la santé de la femme enceinte.
En 2022, seulement 161 avortements légaux ont été effectués, confontrant aux 2000 approximatifs avant le durcissement des régulations en 2020. D’après des organisations féministes, environ 100 000 femmes mettent fin à leur grossesse chaque année en utilisant des pilules abortives, qui sont interdites en Pologne, ou en se rendant à l’étranger.
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