Philippe Minard, spécialiste de l’histoire des structures sociales et économiques des sociétés de l’époque moderne, est décédé subitement à Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne) dans la nuit du 23 au 24 mars, à l’âge de 62 ans. C’est un peu plus d’un an après la mort de son mentor, Daniel Roche, avec qui il était très lié.
Philippe Minard était un homme créatif et passionné qui a réussi à mélanger son parcours basé sur l’excellence avec sa participation à de nombreux projets collectifs. L’enseignement ne l’a jamais empêché de se lancer dans ces périples.
Né à Pont-Audemer (Eure) le 18 octobre 1961, il était le produit d’une famille enracinée dans la campagne – avec des ancêtres agriculteurs et un père mécanicien agricole. Ce n’est qu’à l’époque où il rejoignit les classes préparatoires à Paris et au lycée Henri-IV que sa vie a pris un tout autre sens. Durant la période de la France giscardienne, ce jeune homme, très engagé politiquement, marchait dans les rues avec son nouveau camarade de classe, Vincent Milliot, vendant Rouge ou Le Monde libertaire.
Philippe Minard manifeste un intérêt marqué pour les pays de l’est, et plus particulièrement pour les dissidents du monde soviétique. La victoire de François Mitterrand à l’élection présidentielle du 10 mai 1981 le persuade qu’un grand changement est en vue. Excité, il déclare: «Le monde est à nous!». Le lendemain, il manque un test d’intégration, considérant cela comme une concession à l’ancien système. Malgré une année perdue, il entre sans encombres à l’Ecole Normale Supérieure (ENS) de Fontenay-aux-Roses en 1982. Diplômé en 1985, il maintient son lien avec l’ENS, grâce à l’encouragement de ses amies et collègues Annie Fourcaut et Marie-France Morel, il en devient membre actif.
Philippe Minard, un passeur infatigable
Du côté de la recherche, on s’attendrait à ce que Philippe Minard se concentre sur le contemporain. Pourtant, son ami Vincent Milliot lui présente Daniel Roche, un professeur à Paris-I. L’approche de Roche, une histoire culturelle des Lumières qui ne se limite pas aux élites, suscite en Minard un intérêt plus que convaincant, il adopte la sienne. Ainsi, il consacre son premier ouvrage, déjà doté de la rigueur méthodologique d’une thèse, au monde de l’atelier, aux manuels des maîtres typographes et à deux autobiographies de compagnons. Il y dépeint la construction d’une vision aristocratique et indépendante du métier dans son ouvrage « Typographes des Lumières ». Les leçons tirées de l’édition critique de Daniel Roche du « Journal de ma vie » de l’artisan Jacques-Louis Ménétra sont si admirablement appliquées, que Roche lui-même rédige une préface, lui accordant une reconnaissance de son travail.
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