Est-ce que le suicide est un acte de lâcheté ou de bravoure ? Egoïste ou altruiste ? Est-ce une décision personnelle ? C’est le genre de questions abordées lors de la formation des Sentinelles étudiantes, un programme conçu par Nightline France et le Groupement d’études et de prévention du suicide, soutenu par l’agence régionale de santé d’Ile-de-France. Il vise à former les étudiants pour identifier et guider leurs camarades en situation de détresse. « Ces interrogations sont destinées à vous inciter à réfléchir aux préjugés qui pourraient empêcher quelqu’un de demander de l’aide, ou vous conduire à porter un jugement. Il est important de les mettre de côté pour être pragmatique », explique Caroline Olivier, en charge d’une session organisée en février à l’université PSL, au centre de Paris.
Seis jeunes gens, âgés de 20 à 27 ans, issus de diverses disciplines n’étudient pas seulement la théorie; l’une d’entre eux, Jérémie Hubert, un étudiant en commerce de 27 ans, a révélé avoir été harcelé il y a trois ans et avoir perdu son père : « J’étais le seul membre de ma famille, sur trois générations, à faire des études supérieures. Je ne me sentais pas à l’aise pour parler de mon malaise avec ma famille, car je craignais qu’ils me conseillent d’arrêter mes études. Un soutien entre pairs aurait été plus facile pour moi. »
Au cours des neuf heures de formation, suite à un module d’introduction initial sur la santé mentale, les jeunes sont soumis à des scénarios pratiques. Le groupe va dès lors s’efforcer de reconnaître et approcher les individus qui souffrent, afin de les aiguiller vers des ressources adéquates. Ils commencent notamment par le 3114, le numéro national de prévention du suicide. Caroline Olivier suggère : « Si nous sommes préoccupés pour une personne, il est préférable de lui demander directement si elle a déjà envisagé le suicide plutôt que d’utiliser des euphémismes pour parler de pensées sombres ou d’évasion de la réalité. Le fait de poser la question n’incite pas à passer à l’acte, et témoigne de notre capacité à accueillir la souffrance d’autrui ».
« Moins de préjugés »
La psychologue clinicienne confirme que les jeunes sont de plus en plus ouverts à discuter de la santé mentale: « Ils ont moins de préjugés, n’hésitent pas à parler du suicide. Ils souhaitent se l’approprier. » Un rapide coup d’œil sur les réseaux sociaux confirme cette tendance. On y voit fleurir de plus en plus de comptes dédiés aux troubles de la santé mentale, comptant des dizaines de milliers d’abonnés, comme « Bonjour anxiété », « Paye ta psychophobie », « Dose de psy », ou encore « Les folies passagères ».
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