Avec un bonnet bleu ciel couvrant ses cheveux dorés, Anna lutte pour libérer les sangles de son harnais qui lui encombre les jambes. Elle tient un morceau de pain dans sa main gauche qu’elle consomme rapidement, s’excusant pour sa faim intense. Elle est une militante opposée à l’A69, une autoroute contestée qui s’étendra sur 53 kilomètres de Toulouse à Castres d’ici la fin de l’année 2025.
Pendant trente-neuf jours, Anna et deux autres opposants, surnommés les « écureuils », sont restés perchés plusieurs mètres au-dessus du sol sur un arbre dans le bois de la Crémade, dans la commune de Saïx (Tarn), pour empêcher qu’il ne soit coupé. Se nourrissant principalement de bourgeons de platane, de sel et de sucre, ils sont descendus volontairement de leur abri précaire le dimanche 24 mars.
L’événement n’a pas échappé à l’attention du public. Les trois opposants ont été accueillis par une foule de deux cents militants à la « Crem’Arbre », un nom donné par les anti-A69 à la zone à défendre (ZAD) située le long du parcours envisagé pour la future autoroute, sous une pluie d’applaudissements. Un contingent de 110 gendarmes mobiles, accompagnés du préfet du Tarn, Michel Vilbois, assistaient également à la scène. « Je suis épuisée mais heureuse de voir tant de gens et d’être de retour sur le sol car la forêt est protégée », explique Anna avec un sourire. « Car enfin, la nature reprend ses droits. »
« C’est une victoire symbolique », conclut-elle.
Une orthophoniste de 25 ans basée à Lille fait allusion à la récente déclaration de l’Office français de la biodiversité (OFB). Trois jours auparavant, l’OFB avait publié son compte-rendu d’audition, affirmant que quatorze espèces protégées avaient commencé à construire leurs nids. Selon cette déclaration, il était interdit de couper les arbres avant le 1er septembre. C’est ce que Me Alice Terrasse, représentante légale de Jean Olivier, l’ancien directeur de France Nature Environnement Occitanie Pyrénées, a rapporté. Olivier avait porté plainte auprès du procureur de Toulouse le 20 mars, contestant la légalité des coupes d’arbes dans cette zone et soulignant le risque pour la nidification potentielle des mésanges bleues en cas d’abattage. Une enquête a été initiée à la suite de cette plainte.
Dans sa demande d’autorisation environnementale, le concessionnaire Atosca avait identifié cette zone forestière comme ayant un intérêt écologique majeur, ce qui signifiait qu’aucun arbre ne pouvait être coupé en dehors de la période du 1er septembre au 15 novembre. L’ordonnance environnementale du 1er mars 2023 stipulait donc que le concessionnaire devait respecter ces conditions pour préserver la local faune, y compris les chauves-souris et les pigeons colombins. Cependant, les premiers abattages dans cette forêt avaient commencé prématurement, le 21 février.
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