Sur l’interminable plaine du Danube, à environ 60 kilomètres au nord de Bucarest, des engins de construction aplatissement une section de route. Emanuele Lancellotti, employé de la société de construction italienne Pizzarotti, explique : « Nous avons deux ans pour achever un tronçon de 21 kilomètres d’autoroute et deux échangeurs, un rythme qui est assez rapide pour la Roumanie ».
Pizzarotti, avec son allié roumain Retter, a remporté en 2022 le « lot 1 » de la future autoroute A7, hautement stratégique, qui est censée finalement connecter Bucarest à la frontière ukrainienne. Une route de presque 500 kilomères du nord au sud, dont ce pays de l’est de l’Europe rêve depuis des dizaines d’années, mais qui a acquis une « importance immense » avec la guerre en Ukraine, comme le reconnaît M. Lancellotti.
« Le but principal de cette autoroute est d’aider la Roumanie en raccordant certaines régions [du nord-est] de notre pays qui étaient jusqu’ici défavorisées », nuance Guido Retter, le directeur de la société qui porte son nom. Il est contrarié que les médias de Kiev aient trop rapidement qualifié ce projet comme un symbole du soutien de la Roumanie à son grand voisin du nord.
Financé par le plan de relance post-Covid-19 de l’Union européenne, le projet de l’A7 a certes été initié avant l’attaque de l’Ukraine par les forces russes, mais le projet progresse désormais à une rapidité inhabituelle pour un pays qui avait jusque-là une réputation de lenteur dans la réalisation de grands travaux. Depuis le début de la guerre, « nous avons accéléré et nous nous sommes davantage concentrés », déclare à Bucarest Sorin Grindeanu, le ministre social-démocrate des transports, qui s’engage « à terminer la A7 d’ici 2026 ».
La défense du « flanc est » de l’OTAN.
Une fois achevée, l’infrastructure routière principalement connue sous le nom d’autoroute de la Moldavie, pourrait d’une part simplifier le transfert de grains ukrainiens vers le port roumain de Constanta situé sur la mer Noire. D’autre part, elle pourrait faciliter le transport de l’armement lourd à destination de l’Ukraine. Sa participation à la protection d’un pays qui représente le « flanc oriental » de l’OTAN est également incontestable. En effet, Ben Hodges, ancien commandant des forces américaines en Europe, a critiqué en août 2023 « l’état lamentable des infrastructures roumaines » qui « n’encouragera pas l’intervention rapide des forces de l’OTAN en cas d’agression russe ».
En l’état actuel des choses, il faut environ sept heures de route difficile pour relier Bucarest à Siret, le principal point de connexion entre les deux nations. À l’est, le delta du Danube, qui forme une frontière naturelle entre l’Ukraine et la Roumanie, demeure un cauchemar pour la circulation en raison de ses franchissements par ferry et ses chemins non revêtus. « Avant le conflit, les relations avec l’Ukraine étaient presque inexistantes », justifie M. Grindeanu pour expliquer le niveau médiocre des liaisons vers ce voisin. « Mais maintenant, tout est en progression », assure-t-il tout en indiquant l’étendue des projets en cours sur une grande carte étalée sur son bureau.
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