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21 mars 2024 18 h 13 min

« Cher Instant Je Te Vois »: Feuilleton de Lamarche

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Caroline Lamarche, dans son œuvre « Cher instant je te vois », rend hommage à Margarida Guia, une compositrice et chanteuse belgo-portugaise qui est décédée en juillet 2021 à l’âge de 48 ans suite à un cancer. Lamarche et Guia avaient collaboré sur plusieurs projets, dont le documentaire radiophonique Crimen amoris (2014) sur l’emprisonnement de Verlaine à Mons, ainsi qu’une exposition à Bruxelles intitulée « Les Femmes dans l’art brut » (2019).

Le livre de Lamarche n’est pas une plainte pour la perte de son amie, mais un poème narratif vibrant qui capture l’essence même de la vie à l’approche de la mort. Il est plein d’énergie, de sons, de phrases chargées de l’importance du moment et des façons de naviguer entre l’espoir et la peur. C’est une expérience à consommer tout à la fois, comme une bouffée d’un éclair.

Le livre met également en avant les défis de la maladie à l’époque de la Covid-19. Guia, en lutte contre un cancer, doit alterner entre une unité de soins palliatifs pour soulager la douleur de sa tumeur et l’hôpital pour sa chimiothérapie. Ses expériences hospitalières sont généralement désastreuses en raison de la pression sur les soignants due à la pandémie. Le roman précédent de Lamarche, « La Fin des abeilles » (Gallimard, 2022), traitait déjà des conditions difficiles des maisons de retraite pendant le confinement.

Margarida est à un stade où aucune thérapie ne peut plus lui être d’aucune utilité, nous décidons donc d’arrêter tous les traitements. Elle est transférée dans un endroit où une grande attention lui est accordée, comme cela devrait être le cas partout. Cependant, elle est consciente qu’elle n’en sortira jamais. Dans le contexte actuel, les visites étant presque totalement interdites, ses amies restent en contact grâce à leur téléphone. Tous les jours, celle qui est à l’extérieur discute avec celle qui est à l’intérieur, lui envoie des enregistrements WhatsApp remplis de chants d’oiseaux, des mots d’encouragement, des poèmes et des photos de fleurs. Pour partager les avancements, celle qui est à l’intérieur fait part de l’évolution de la situation, décrite comme « de plus en plus réelle », et ce malgré la maladie qui la ronge. Elle ne change pas le ton de sa voix, soulignant qu’elle est toujours présente, qu’elle ne s’effondre pas et rappelant sa devise de prendre un jour après l’autre, soulignant qu’il n’y a rien de plus à dire. Cela, avec une intensité palpitante.

Le titre du livre tire son inspiration d’une citation de Beckett, « cher instant je te vois/ dans ce rideau de brume qui recule » (Poèmes, Minuit, 1978). Il s’agit d’une interprétation intimiste de Carpe Diem, un concept épicurien formulé pour la première fois par Horace au premier siècle avant J.C, dans un poème conseillant à son amie Leuconoé de ne pas se préoccuper de son jour de mort. Initialement, cette expression signifiait « Prends le jour présent », « profites de l’instant actuel » et servait de guide à une vie structurée. Cependant, elle a été détournée pour légitimer une chasse insouciante au plaisir. Les personnages de ‘Cher instant je te vois’ vivent dans ce contexte où toute issue semble temporaire. Malgré cela, cet interstice temporel a la capacité d’intégrer tout un univers, de la désolation aux scènes comiques, des souvenirs de l’Algarve aux aboiements du chiot, de l’expérience culinaire partagée avec des immigrants d’Erythrée ou de Somalie à Bruxelles, à la poésie de Pessoa, Baudelaire ou Sylvia Plath. Pour lire la suite de cet article, un abonnement est nécessaire.

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