Le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, a tiré la sonnette d’alarme le 12 mars, en évoquant l’obsession latente de la France pour la dette. Moscovici, qui a également été ministre de l’économie sous la présidence de François Hollande de 2012 à 2014, a fait cette déclaration quelques semaines après l’annulation urgente de 10 milliards d’euros de crédits budgétaires. Cette action a eu lieu moins de deux mois après l’approbation du projet de budget 2024 par le Parlement.
Bien que la panique n’ait pas encore pris le dessus, la situation est qualifiée de « sérieuse » et « préoccupante ». Selon les chiffres, la dette publique a grimpé de 800 milliards d’euros en cinq ans pour atteindre 3210 milliards d’euros, soit plus de 110% du PIB national. Le coût du service de la dette, autrefois à 20 milliards d’euros par an, a augmenté à 54 milliards d’euros en 2023 et pourrait atteindre 87 milliards d’euros dans trois ans.
Si la France souhaite maintenir le contrôle de ses dépenses et ne pas être désavantagée dans ses pourparlers avec l’Europe, elle doit cesser d’accumuler de la dette. Aujourd’hui, le pays est l’un des plus endettés de la zone euro et l’un des plus lents à diminuer ses déficits.
Des justifications solides existent pour comprendre l’excitation qui a surgi depuis 2017, ainsi que l’insouciance qui l’a considérablement soutenue : jusqu’à l’inversion de la politique monétaire en 2022, l’argent était pratiquement gratuit tandis que les demandes de financement étaient monumentales. Les secteurs de la police, de la justice, de l’armée, de l’éducation nationale et de la santé ont brusquement mis en évidence leurs défaillances dues à un manque d’investissement alarmant sur les décennies précédentes, exacerbant ainsi la crise démocratique. Il était essentiel de les reconstituer.
L’ère budgétaire dans laquelle nous sommes entre est évidente. La pandémie de Covid-19 a consacré l’Etat comme le sauveur de l’économie française, tandis que l’écologie et la réindustrialisation ont demandé des investissements massifs. Cependant, en France plus que dans d’autres pays, l’approche « à tout prix », qui s’est intégrée dans le rôle de l’Etat protecteur, est devenue un automatisme, voire une dépendance, acceptée par tous les acteurs politiques, de l’extrême gauche à l’extrême droite. Un cas illustratif est le dispositif énergétique, activé en 2022 et renouvelé en 2023 pour atténuer l’augmentation des prix du gaz et de l’électricité, qui a coûté à l’Etat français 36 milliards d’euros. La France est le seul pays européen à avoir mobilisé les fonds publics à un tel niveau pour préserver le pouvoir d’achat, alors que la dette publique redevient un motif d’inquiétude.
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