Pour discuter de la mode actuelle, il n’y a personne plus approprié que Jean Paul Gaultier. Sa carrière, riche en expériences diverses, n’a d’égale que peu d’autres. Il a collaboré avec des icônes de l’industrie, telles que Pierre Cardin et Jean Patou, été témoin de l’émancipation de la mode féminine et de l’essor du prêt-à-porter. Dans les années 1970, il a créé sa propre marque pour perturber l’univers rigide du luxe français, remettant en question l’illusion du chic parisien. Tout comme Claude Montana et Thierry Mugler, il a vécu le tumulte des années 1980, mais a su se réinventer pour éviter de devenir le symbole d’une esthétique révolue.
Avec ses idées innovantes telles que la jupe pour hommes, la garde-robe unisexe et l’introduction du tatouage sur les podiums, Jean Paul Gaultier n’a pas hésité à bousculer le monde de la mode. De 2004 à 2010, il a dirigé la maison de luxe la plus sobre et raffinée de toutes, Hermès, tout en se lançant dans la haute couture. De plus, il a créé des parfums qui assurent dorénavant la continuité de sa marque, appartenant au groupe espagnol Puig tout comme la gamme de parfums.
Jean Paul Gaultier a officiellement pris sa retraite en janvier 2020, juste avant l’irruption de la crise du Covid-19. Cependant, il reste très actif, participant à la lutte contre le sida en tant qu’ambassadeur du Sidaction dont la prochaine édition se tiendra du 22 au 24 mars. Il continue également de surveiller de près l’industrie de la mode et demeure impliqué dans son entreprise, invitant pour chaque nouvelle collection de haute couture un designer de son choix à revisiter ses archives.
Après des collaborations avec Olivier Rousteing, Julien Dossena et Chitose Abe, et avant la collection de juin signée Nicolas Di Felice, Jean Paul Gaultier a fait appel à la talentueuse créatrice irlandaise Simone Rocha pour son défilé de janvier. C’est dans les élégants salons du quartier Haute Couture, au 325 rue Saint-Martin, dans le troisième arrondissement de Paris, que nous avons eu la chance de rencontrer Gaultier, entouré des créations de Rocha, composées de seins pointus et parcourues de lacets évoquant des corsets ou de rayures rappelant la marinière, signature du designer de 71 ans.
Comment Gaultier perçoit-il ces œuvres ?
C’est touchant de voir mes codes stylistiques réinterprétés, d’autant plus que c’est ici même que j’ai exercé mon métier. J’ai l’impression d’observer mon œuvre depuis un nouveau point de vue. Simone Rocha a une approche plus romantique que la mienne, mais nous avons en commun une certaine appréciation pour l’asymétrie. Ce côté est très britannique. Les Français ont toujours cette manie de déterminer ce qui est « chic » et ce qui ne l’est pas, d’établir un standard de bon goût. Non pas que ça m’ait affecté, mais ce n’est pas sans conséquence…
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