Ainsi, en plein cœur de la complexité des voies ferrées, où se croisent quotidiennement 1200 trains, se dresse ce pont vieux de 130 ans, « Pont 1 », qui suscite toutes les curiosités et préoccupations du réseau SNCF depuis plus d’une demi-décennie. Sa présence continue de stimuler l’intérêt pour les dix mois à venir, et il commencera véritablement à faire sensation le vendredi 25 octobre. Situé juste derrière l’échangeur de la porte de La Chapelle, au nord de Paris, bien avant l’A86, ce pont sert de passerelle pour les RER B et D qui se dirigent vers la banlieue nord, les TER vers la Picardie, et les TGV en route vers Lille, Dunkerque, Londres, Bruxelles et Amsterdam. Il joue également un rôle clé dans le mouvement de marchandises, tout en facilitant les déplacements dans le sens opposé. Le pont, niché au centre de la plaine ferroviaire divisant Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) en deux, se trouve être sur le terrain ferroviaire le plus actif d’Europe. De plus, « Pont 1 » est d’autant plus significatif car c’est ici que doit se connecter la navette aéroportuaire Paris-Roissy (Charles-de-Gaulle Express) en 2027. Cellui-ci a été construit en 1894, à peine cinq ans après la tour Eiffel, et est maintenant en attente de remplacement.
L’épopée du Pont 1, comme beaucoup d’autres de son époque – ce qui est précisément le thème – a vu ses jours de gloire s’écouler. Depuis l’été 2023, aucun TER ou train de banlieue ne l’emprunte ; seuls les RER B et D circulent sous sa structure grise en fer, caractéristique de la fin du XIXe siècle. Il ne risque pas de s’effondrer, mais les traversées incessantes l’ont affaibli et c’est précisément par là que le Charles-de-Gaulle Express doit passer. « Une fissure pourrait apparaître à tout moment, nécessitant une intervention d’urgence ou une réduction de la vitesse », prévient Séverine Lepère, à la tête de SNCF Réseau Ile-de-France. Elle et ses équipes se chargent de l’extension et du rajeunissement d’un des réseaux les plus denses à l’échelle mondiale. Ils prennent également soin de sa maintenance.
La situation complexe du Pont 1 pourrait être réduite à un imposant projet de travaux publics – substituer une construction massive par une autre pesant près de 1800 tonnes – si ce n’était l’impact considérable sur les millions de voyageurs qui empruntent chaque jour la gare du Nord. C’est là où tout se complique, avec des travaux planifiés plusieurs années à l’avance, des solutions techniques inédites et la nécessité de faire appel à des préfets pour des arbitrages, face à des circonstances exceptionnelles comme la pandémie de Covid-19, les Jeux Olympiques ou les décisions de justice.
« C’est avec bonheur et honneur que nous, la génération actuelle, avons la responsabilité de rénover ces structures conçues pour un siècle dans les régions les plus populaires du réseau, » déclare Séverine Lepère avec une pointe d’ironie. En Ile-de-France, les plus vieux de ces bâtiments ont bien sûr été érigés dans les avant-gares de Paris. Au cours des prochaines dix années, une dizaine de projets de cette ampleur sont déjà prévus, y compris deux autres à Saint-Denis et un dans le 17ème arrondissement. En France, parmi les 50 000 structures d’art répertoriées, 200 sont considérées comme prioritaires.
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