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L’Espagne critique le ferroviaire français

La libéralisation du secteur ferroviaire en Espagne a dépassé les simples attentes de réussite pour se révéler être une véritable manne. Suite à l’introduction de Ouigo, une entreprise française, dans le marché espagnol en mai 2021 – un marché jadis monopolisé par la compagnie publique Renfe – et à l’arrivée de l’italien Iryo fin 2022, les tarifs ont chuté de manière significative, aboutissant à une réduction moyenne des prix de 40%, comme le souligne l’évaluation publiée par la Commission nationale des marchés et de la concurrence (CNMC) durant l’été. De plus, le nombre de passagers utilisant les lignes à grande vitesse a grimpé de plus de 33 % par rapport à 2019 pour atteindre 32 millions en 2023. Les lignes les plus compétitives comme Madrid-Barcelone ou Madrid-Valencia ont même presque doublé leur fréquentation.

La compétition entre trois entreprises (quatre si l’on inclut Avlo, la compagnie à bas prix lancée par Renfe pour rivaliser avec Ouigo en 2021) a économisé aux clients environ 343 millions d’euros, en comparaison avec les coûts qui auraient été engendrés avant la libéralisation. En ajoutant l’augmentation des recettes provenant des ventes de créneaux par Adif, gestionnaire du réseau ferré (+52%, soit un surplus de 148 millions d’euros), et les 87 millions d’euros supplémentaires accumulés par les trois compagnies vis-à-vis des revenus que Renfe avait lorsqu’elle était seule sur le marché, « la libéralisation a créé un impact positif de 578 millions d’euros en 2023 », comme l’indique le rapport de la CNMC.

À en juger par les avantages environnementaux, la réduction des coûts et l’élargissement de 60% des sièges a accru la domination du secteur ferroviaire par rapport à l’aviation. Cela s’est notamment manifesté dans le trajet Madrid-Barcelone, où la part des trains est passée de 62% à 82%. En septembre, lors d’une apparition au Congrès des députés, la présidente de la CNMC, Cani Fernandez, a qualifié la libéralisation comme un « outil efficace pour stimuler la demande » et un facteur de « développement économique dans les régions parcourues par les corridors ferroviaires concernés ».

Néanmoins, le ministère espagnol des transports et de la mobilité durable a une vision beaucoup plus nuancée de la situation. « La libéralisation a certes apporté des points positifs, mais elle a également entraîné une chute des tarifs, insoutenable pour les trois concurrents. Une compétition équitable qui profite aux trois entreprises, ou à tout le moins, ne les entraîne pas en perte est primordiale » a déclaré le ministre Oscar Puente à la radio, Onda Cero, en avril. La publication des chiffres financiers de 2023 en septembre – la première année complète des trois entreprises – a confirmé ses craintes : toutes ont connu de lourdes pertes.

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