« Le lundi 14 octobre, l’atmosphère est déprimée à l’usine de Lisieux (Calvados) de Sanofi. Comme la plupart de ses confrères, Christophe Quillet, employé du géant pharmaceutique depuis plus de 40 années, dont la moitié s’est consacrée à la production de Doliprane à l’usine Normande, est bouleversé. « Même si nous avons su depuis un an que cela arriverait, la nouvelle a toujours été un choc », déclare-t-il. La semaine précédente, Sanofi avait décidé d’engager des pourparlers exclusifs avec CD&R, un fonds d’investissement américain, pour vendre 50% d’Opella, leur division de santé grand public qui produit le Doliprane, un analgésique populaire dans les pharmacies françaises.
Inquiet, l’ex-représentant CGT du comité social et économique de l’usine a rejoint le rassemblement de grève organisé lundi par les employés de l’usine. Malgré les assurances de Sanofi que l’avenir du Doliprane produit à Lisieux n’est pas compromis, les travailleurs restent sceptiques. « S’il n’y a vraiment pas de risque, qu’ils s’engagent alors par écrit à continuer à le produire en France pour les trente prochaines années. Il ne s’agit pas d’un bonbon mais d’un médicament dont les Français ont besoin pour se soigner », déclare-t-il.
L’échec d’Euroapi, l’ancienne division de principes actifs de Sanofi qui s’est séparée lors d’une IPO en 2022 (Sanofi conserve 30% des actions) a laissé un goût amer aux employés, tout comme les sites de distribution natioanux du groupe ont été externalisés à une entreprise de transport américaine, DHL, au printemps, sans grand intérêt public.
Le Doliprane est le médicament le plus consommé en France. »/
En réaction à la vente d’Opella, une société avec 11 000 employés, dont 1 700 en France et un chiffre d’affaires de 5,2 milliards d’euros en 2023, un tollé s’est élevé. Opella possède un assortiment de produits comprenant environ 100 marques de médicaments en vente libre et de compléments alimentaires. Depuis vendredi dernier, des politiciens de différentes tendances ont protesté, exprimant leur opposition à la vente du Doliprane, le médicament le plus utilisé en France, à un fonds d’investissement américain. Certains députés ont même appelé l’État à empêcher la vente.
Le gouvernement, en réponse, fait des efforts pour apaiser la situation. Lundi, Antoine Armand, le ministre de l’économie, accompagné de Marc Ferracci, le ministre responsable de l’industrie, s’est rendu à Lisieux, le principal lieu de fabrication du Doliprane en France. Ils ont rencontré les employés et les syndicats sur ce site, avec pour interlocuteurs Frédéric Oudéa, président du conseil d’administration du laboratoire pharmaceutique, et Julie Van Ongevalle, la chef d’Opella. Antoine Armand était déterminé concernant les conditions de la vente de la filiale de Sanofi. « Je veux être ici très précis. Nous exigerons des conditions très claires, strictes et incontestables pour l’avenir « , a déclaré Antoine Armand, assurant que « le Doliprane sera toujours produit en France ».
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