La Chine est confrontée à un problème d’excédent d’acier dû à une chute de la consommation domestique, provoquée par l’arrêt de nombreux projets de construction et la crise immobilière. Pour maintenir sa massive production d’acier, le pays s’appuie sur une augmentation des exportations vers d’autres régions du globe. Le cabinet basé à Londres, Kallanish Commodities, estime une croissance des exportations de 5,8% en 2024, le niveau le plus élevé depuis 2016. En 2024, des zones comme l’Asie, le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Amérique latine devraient représenter 12% des achats de la production chinoise (contre 6% en 2022).
La Chine, qui produit plus de 900 millions de tonnes, soit la moitié de la production mondiale d’acier, va expédier environ 100 millions de tonnes de ce matériau à l’international, ce qui représente les deux tiers du volume produit en Europe.
De plus, la faiblesse de la demande intérieure chinoise pour les véhicules électriques, les batteries, les panneaux solaires et les éoliennes a ajouté à ce surplus. Axel Eggert, le directeur d’Eurofer (l’entité représentative des intérêts européens dans l’industrie de l’acier), exprime ses préoccupations, considérant que la surproduction d’acier chinoise est un problème à échelle internationale. Il y a également des allégations de « dumping chinois ».
Face à la menace commerciale, plusieurs pays ont opté pour l’établissement de barrières douanières. Par exemple, une surtaxe de 25 % a été imposée par le Canada fin août sur l’acier et l’aluminium importés de Chine, prenant effet à partir du 15 octobre. En représailles, une enquête antidumping a été lancée par Pékin le 3 septembre concernant le colza canadien. Des droits de douane plus élevés, atteignant 25 %, ont également été appliqués par le Brésil au printemps. Nippon Steel, le quatrième producteur mondial, a demandé à la fin d’août de pareilles mesures au gouvernement japonais. Après que ses importations d’acier chinois ont doublé en une année, le Vietnam a entrepris en juin une enquête antidumping aussi.
Cela dit, la hausse des tarifs douaniers ne résout pas toujours les problèmes. L’aciérie chilienne Huachipato (2 700 employés), malgré l’instauration d’une surtaxe temporaire allant de 25% à 34% sur l’acier chinois par les autorités chiliennes, a dû suspendre ses opérations en raison de contraintes financières. Cette décision était motivée par « l’intensification du dumping chinois » qui faisait obstacle à la compétitivité de leurs prix. En 2023, une augmentation impressionnante de 44% par rapport à l’année précédente a été observée avec l’arrivée de 10 millions de tonnes d’acier chinois sur le marché d’Amérique latine.
Selon Tomas Gutierrez, analyste chez Kallanish Commodities, l’excédent de production en Chine est distribué mondialement, contrairement à la dernière crise en 2015 où la majeure partie avait été consommée par l’Asie du sud-est en raison de sa faible production. Cependant, la croissance des expéditions chinoises est principalement concentrée au Moyen-Orient et en Asie du sud-est, où la demande est la plus énergique. Axel Eggert indique que l’Europe est également influencée, car la surproduction chinoise inonde les pays tiers comme la Corée du Sud, le Japon ou Taïwan, forçant leurs industries à écouler leur production en Europe. Ainsi, Eurofer demande à Bruxelles d’augmenter les tarifs douaniers pour tous les pays enregistrant une surproduction. Le reste de l’article est cependant réservé aux abonnés.
Ce type de mesure serait-il envisageable en France ?