L’ouverture célébrée de l’immense gare Michigan Central à Detroit, inutilisée depuis 1988, a eu lieu le 6 juin. Elle a été suivie globalement, attirant 20 000 citoyens locaux et des millions de téléspectateurs distants, particulièrement les admirateurs du rappeur le plus populaire de la ville, Eminem, qui a organisé le spectacle. La chanson Houdini a été jouée pour la première fois en live par l’artiste avec l’orchestre symphonique de Detroit, faisant écho à la transformation en cours : Michigan Central est renaissante non pas en tant que gare, mais en tant que centre dédié à l’avenir de la mobilité. Detroit, autrefois appelée « Motor City », espère se réinventer comme la cité de la mobilité.
Bill Ford, président de Ford Motor, a exprimé le désir de donner une seconde vie à ce bâtiment iconique, témoin du passé fluctuant de la ville. En 2018, la compagnie automobile a fait l’acquisition de la gare détériorée et abandonnée pour 90 millions de dollars (soit 78 millions d’euros de l’époque) de la famille de Manuel Moroun, un entrepreneur de Detroit. De plus, elle a investi près de 900 millions dans la rénovation.
La renaissance de Michigan Central vise à effacer le souvenir de la banqueroute de Detroit en 2013, suite à la crise des subprimes qui a failli anéantir les géants automobile. Elle se veut également faire oublier l’oubli des quartiers périphérique du centre historique (« Downtown » selon les Américains) qui, depuis des années, ont été ravagés par le trafic de drogues, la prostitution et ont été négligés par les classes moyennes et supérieures.
Six ans ont passé depuis l’acquisition du lieu par Bill Ford et sa profession de foi est bien mise en évidence dans le grand hall somptueusement restauré : « Ce bâtiment est un véritable récit de notre ville. Autrefois, cette gare était l’équivalent de notre Ellis Island ». C’était effectivement le point d’entrée des futurs employés des usines de son arrière-arrière-grand-père. L’usine Ford originale, située avenue Piquette, est encore ouverte aux visiteurs. La deuxième usine, à Highland Park, est gravée à jamais au Detroit Institute of Arts grâce à une fresque impressionnante du peintre mexicain, Diego Rivera. « Lorsque le dernier train a quitté la gare [en 1988], raconte le milliardaire, [la gare] est devenue une zone désespérée, le symbole d’une époque dure, un monument rappelant les épreuves que la ville a dû affronter. » Pour lui, sa réouverture est « une affirmation audacieuse que les jours les plus glorieux de Detroit sont encore à venir ».
Corktown est déjà en pleine gentrification – le secteur de Michigan Central tire son nom de la ville irlandaise d’où provenaient ses premiers habitants, y compris Henry Ford. Cependant, cette transformation ne se limite pas à Corktown, elle s’étend à toute la ville. Du dix-septième étage de l’ancienne gare, la ville révèle toute son originalité. Au cœur du quartier historique, des grues encadrent une nouvelle tour en pleine construction : Hudson’s Detroit, la première depuis les années 1970. En 2025, ce nouveau bâtiment deviendra le nouveau siège de General Motors et sera la vitrine de l’agence immobilière Bedrock, détenue par Dan Gilbert.
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