En évoquant la croissance rapide des entreprises d’Elon Musk, SpaceX et Starlink, la dirigeante du plus grand fournisseur français de satellites de communication réfléchit sur comment ces entreprises ont changé le cours de la concurrence mondiale et affaibli la position spatiale de l’Europe.
Elle se demande quel a été l’impact de l’entrée d’Elon Musk dans le secteur des fournisseurs de satellites. Depuis la dernière décennie, c’est indéniablement Musk qui a mené l’innovation en construisant Starlink, sa propre grappe de satellites destinée à offrir des services d’internet à haut débit. Il sera prochainement imité par Jeff Bezos et Kuiper. Grâce à d’énormes subventions, Musk réagit rapidement car il gère l’intégralité de la chaîne opérationnelle – de la production des fusées, des satellites et des terminaux à leur lancement en orbite et leur maintenance. Cela diffère de nous, les fournisseurs traditionnels, qui nous occupons principalement de l’exploitation des satellites que nous acquérons et des terminaux, et planifions leurs départs.
Nous essayons tous de nous adapter. En 2022, nous avons acquis la grappe de satellites OneWeb, qui propose également l’internet à haut débit, nous permettant d’établir notre présence, comme eux, sur l’orbite basse à 1000 kilomètres de la Terre, très prisée pour les connexions télécom, alors que nos efforts étaient plutôt concentrés sur la mise en orbite géostationnaire de satellites à 36 000 kilomètres.
Comment voyez-vous l’introduction d’Ariane-6 sur ce marché concurrentiel ?
Nous avons patiemment attendu depuis 2014, année où nous avons conclu le premier contrat pour ce projet. Les anticipations sont élevées pour ce formidable propulseur, le Ariane-6. Cependant, je garde l’espoir qu’il sera compétitif commercialement. Nous cherchons un propulseur qui offre à la fois un prix compétitif et la disponibilité pour les lancements. C’est un grand pas vers l’avant, mais sera-t-il suffisant pour l’Europe face à la rivalité americaine ?
Que voulez-vous que j’explique plus clairement ?
La véritable question est de savoir comment compenser le retard que nous avons dans le domaine des lanceurs. Avec l’Ariane-6, nous sommes en train d’implanter une partie réutilisable pour la première fois, alors que SpaceX le fait déjà depuis des années [le premier usage de cela a été le 30 Mars 2017, avec la fusée Falcon-9, dont le premier étage avait été utilisé lors d’un tir précédent]. De plus, ils lancent des fusées à une fréquence impressionnante, parfois une par jour, en contradistinction avec l’Ariane-5 qui exige deux à trois mois de préparation pour un lancement. Le site de lancement des Falcon-9 est stupéfiant. Cinq ou six propulseurs sont en attente dans un hangar, et d’autres sont en route dès qu’ils partent. C’est de la production à grande échelle, alors que nous opérons plus comme des artisans.
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