Le mouvement de protestation des travailleurs publics suédois, mené par le syndicat Kommunal, a montré un sentiment de frustration croissant parmi les employés. Un projet initial de grève prévu pour le 18 avril a été annulé la veille de son lancement, cependant, le personnel infirmier a continué à mettre la pression, menaçant de cesser de travailler si leurs besoins – tels que la nécessité de clarifier leurs horaires de travail – n’étaient pas respectés. Cette situation survient au milieu de la renégociation des conventions collectives dans le secteur public suédois.
Face à des mesures d’austérité mises en œuvre par les 290 municipalités et 21 régions du pays, les travailleurs publics sont de plus en plus frustrés, leurs finances étant mises à mal.
Malin Tillgren, infirmière en pédiatrie depuis 1998 et représentante du syndicat Kommunal, se souvient du déclin progressif des conditions de travail, notamment du volume toujours croissant des tâches administratives et de l’accélération du rythme de travail. Selon elle, il est courant de commencer la journée à 7h15 avec une liste de patients que l’on sait impossible à gérer dans le temps imparti.
Les conditions de travail de plus en plus difficiles voient certains membres du personnel infirmier éviter de boire en journée pour minimiser les pauses toilettes, les jours de congé s’évaporent, tandis que l’incertitude plane sur le moment où ils seront appelés à travailler en raison d’un manque de personnel dans les hôpitaux et les centres de soins publics. Le secteur privé, en plein essor, propose de meilleures conditions, ce qui a conduit au moins 14 000 des 114 000 infirmières restantes en activité à changer de profession.
Le budget de la santé en réduction et le coût des retraites aggravent encore la situation.
Dans toute la Suède, l’ambiance est similaire : malgré l’importance accordée par les électeurs à la santé, les ressources allouées sont insuffisantes. La situation pourrait même s’aggraver. L’association des autorités locales suédoises, SKR, prévoit un déficit municipal de 7 milliards de couronnes (600 millions d’euros) en 2024, et de 24 milliards de couronnes aux niveaux régional. Le gouvernement conservateur libéral, appuyé par l’extrême droite, a certes annoncé en début avril un supplément de 6,5 milliards de couronnes pour la santé. Mais pour Annika Wallenskog, économiste en chef à SKR, cela ne suffit pas à combler le déficit. Selon elle, la crise actuelle a deux causes majeures : « D’un côté, le budget de la santé a été réduit, bien qu’il ait été augmenté en 2021 et 2022 pour financer la vaccination contre la Covid-19 et rattraper les arriérés de soins dus à la pandémie. De l’autre, le coût des retraites, pris en charge par les autorités locales, a connu une augmentation de 30 milliards de couronnes [2,6 milliards d’euros] en 2023 par rapport à 2022. » Il reste 47.1% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.