L’immense auditorium de l’académie navale de Lanvéoc-Poulmic, située dans le Finistère, est rempli à son maximum pour recevoir le commandant de vaisseau Alban. Le conférencier s’est contenté d’une introduction brève afin de laisser place à une session de questions. Il est conscient que les élèves officiers, venus pour l’écouter, ont beaucoup de questions à poser. Le porte-avions de nouvelle génération, PANG, suscite autant de curiosité qu’il éveille d’admiration. Ce sera le plus gros bâtiment jamais fabriqué en Europe. Avec un poids de 75 000 tonnes, le PANG dépassera largement celui du porte-avions Charles-de-Gaulle, soit 42 500 tonnes.
Mis en fonction en 2001, le Charles – comme l’appellent très affectueusement les marins – est prévu d’être retiré de la flotte navale en 2038. À ce moment-là, ce sera le nouveau monstre propulsé par l’énergie nucléaire qui prendra le relais. Il sera capable d’embarquer une quarantaine d’avions, des Rafale Marine, des hélicoptères, des drones et peut-être l’avion de combat futur provenant du programme SCAF (Système de Combat Aérien du Futur). Il nécessitera également un équipage de 2 000 hommes et femmes, portant l’effectif total à presque 5 000 personnes. Tous ces cadets, qu’ils se destinent aux sous-marins, à l’aéronautique navale, aux fusiliers marins, aux commandos ou aux bâtiments de surface, embarqueront un jour sur le successeur du Charles. « Parmi eux, se trouve même son futur commandant, murmure le commandant Alban. La marine a déjà repéré cette personne. »
Malgré les tumultes politiques et autres obstacles qui sont apparus au fil des années, le projet de construction du second porte-avions nucléaire ne devrait plus connaître de contre-temps. La réalisation de cette structure positionne la France, aux côtés des États-Unis, comme une puissance militaire majeure. Le navire sera le pivot d’une formidable flotte incluant des sous-marins d’attaque, des frégates aux capacités variées ainsi qu’un navire ravitailleur. Cette armada garantira une protection sur un rayon de 1 000 kilomètres. En plus, le porte-avions sera équipé d’une base aérienne renforçant sa capacité d’attaque nucléaire. « Il est à la fois un symbole de force et un instrument de diplomatie », souligne Thierry Burkhard, le chef d’état-major de l’armée française.
La mise en route de ce projet industriel hors norme, qui n’a pas été vu depuis quarante ans, a été approuvée en mai 2023 suite au vote de la loi de programmation militaire pour les années 2024-2030. Dans le budget de 413 milliards d’euros prévu pour la défense durant cette période, près de cinq milliards seront réservés pour ce projet. Un financement supplémentaire d’au moins cinq milliards sera nécessaire pour porter à bien ce projet qui s’élève au total à 10 milliards. Ce dernier doit malgré tout faire face aux restrictions budgétaires susceptibles de survenir avant sa première mise à flot, qui est prévue pour 2036. Les coupes de 10 milliards d’euros récemment annoncées par le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, ne l’impactent pas. Toutefois, l’avenir de ce projet pharaonique est-il assuré pour la décennie à venir ?
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