Bien qu’étant un grand voyageur, Emmanuel Macron, le président, ne se rend pas fréquemment dans les territoires d’outre-mer. Cependant, sa visite en Guyane pour deux jours le 25 mars a une signification qui dépasse simplement le statut de ce vaste territoire amazonien. Cela lui donnera l’opportunité de visiter le Brésil voisin et de discuter de l’industrie spatiale à un moment crucial pour ce secteur, fierté de la France et de l’Europe, qui est écrasé par la concurrence américaine.
Lors de sa visite au centre spatial de Kourou, il aura l’occasion de comprendre l’anxiété d’un secteur au bord de la crise. Le résultat du match entre l’Europe et l’Amérique dans ce secteur en 2023 est indiscutable : trois lancements de fusées Ariane-5 et Vega pour l’Europe, 103 Falcon-9 de SpaceX pour l’Amérique. Les retards constants d’Ariane-6, qui est actuellement en construction sur le site, ont quasiment éliminé la capacité de l’Europe à maintenir sa position dans cette industrie qu’elle a autrefois dominée au début des années 2000.
Une revanche est-elle envisageable ? Elle se fera par le succès d’Ariane-6 mais aussi grâce à l’augmentation de petits lanceurs, plus rentables et capables de mettre en orbite basse de petits satellites de télécommunications très demandés aujourd’hui pour concurrencer le réseau Starlink du fondateur de SpaceX, Elon Musk.
Plus de compétition.
Lors de la visite du président, il a été annoncé par l’Élysée que la France a choisi quatre initiatives privées pour mini-lanceurs pour répondre à cette exigence. Les entreprises Latitude, HyPrSpace, Sirius Space Services, et MaiaSpace (une filiale d’ArianeGroup), vont recevoir un soutien financier d’environ 400 millions d’euros dans le cadre du Plan France 2030. Il s’agira pas d’une subvention, mais d’une commande pour un vol – l’argent ne sera donné que si le lancement est un succès, une méthode inspirée de celle de la NASA pour financer SpaceX.
La saga d’Ariane n’est pas encore terminée, mais pour la prolonger, certains pays membres de l’Agence spatiale européenne ont demandé l’introduction de plus de concurrence dans les petits lanceurs. Les Allemands, déjà en tête, mais aussi les Italiens et les Espagnols soutiennent leurs favoris. C’est la fin d’un symbole – celui d’une Europe spatiale monolithique et unie autour d’Ariane. Les Français, qui hébergent l’entreprise et gèrent le site de lancement, se plaignent mais on les reproche souvent de confondre les intérêts aérospatiaux européens (Airbus, Ariane) avec leurs propres bénéfices. Une compétition dans ce secteur pourrait stimuler et accélérer la réforme nécessaire d’une gouvernance qui n’arrive pas à suivre l’évolution du monde. Comme c’est le cas pour le secteur nucléaire, une autre technologie emblématique, la France est obligée de modifier sa stratégie.
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