Maria Larrea, lauréate du Prix du premier roman en 2022 pour son œuvre publiée par Grasset, a captivé Bérénice Bejo, une célèbre actrice, par la force de son récit autobiographique. L’enthousiasme de l’actrice pour incarner le personnage sur les planches du Studio Marigny est indéniable.
Le livre trace l’histoire de la protagoniste de sa jeunesse à l’âge adulte, et relate aussi le parcours de ses parents qui ont fui l’Espagne franquiste pour s’installer en France. Leur trajet de Bilbao à Paris et leur lutte pour élever leur fille dans la loge d’un concierge sont racontés avec candeur : la mère nettoie les maisons pendant que le père, alcoolique, est le concierge du Théâtre de la Michodière. Bien que leur vie se déroule dans un lieu exceptionnel, la description de Maria reste ancrée dans la réalité et loin de la magie.
Maria se rappelle surtout des situations pratiques : être obligée de se baigner rapidement dans la douche des comédiens et de se coucher dès la fin du spectacle, dormir dans un couloir et subir les disputes nocturnes (ou les violences du père envers la mère).
Plutôt que d’être captivée par le charme de l’envers du décor et l’attrait du plateau, elle tirait satisfaction sur les terrains de jeu de l’école avec sa fierté de pouvoir dire: « La Michodière est dirigée par mon père » face aux moqueries de ses compagnons de classe nantis et aux noms typiquement français. C’est une histoire de résilience. Comment élever le tragique à l’échelle du merveilleux, laisser derrière soi la brutalité paternelle, comment, une fois femme et mère de deux enfants, surmonter les mystères familiaux, comment tenter et réussir à la Fémis et enfin, comment se redéfinir par la création ?
Des mystères à résoudre
La mise en forme du texte (due à Johanna Boyé et Elisabeth Ventura) tente d’infuser aux mots le rythme effréné d’une enquête entrelacée de mystères à résoudre. Toutefois, malgré l’énergie de Bérénice Béjo, l’effort s’avère laborieux. En 2012, l’actrice a remporté le César de la meilleure actrice pour son rôle dans The Artist, de Michel Hazanavicius. En 2013, le festival de Cannes l’avait primée d’un prix d’interprétation féminine pour sa performance dans Le Passé, de Asghar Farhadi. Du côté du cinéma, elle est une actrice accomplie, alors qu’elle s’initie presque pour la première fois au théâtre.
Malgré les risques, elle se lance courageusement dans l’exercice le plus dangereux; un solo qui la met sous les feux des projecteurs. Sa scénographie (une estrade et un rideau de perles) lui offre une aide modeste. Sans compagnon de scène pour l’appuyer, elle doit porter la totalité des personnages qu’elle représente. Leurs sensibilités, leurs traits, leurs motivations. C’est à elle de tenter de convaincre par son interprétation, jusqu’à adopter un accent espagnol. Une présence bienveillante, mais une technique hésitante : l’art du théâtre n’est pas aussi simple. Il reste 5.82% de cet article à lire. La suite est seulement accessible aux abonnés.
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