Dans le monde de la musique, Monsieur Aznavour est souvent perçu comme une inspiration vivante. Le film de Grand Corps Malade et Mehdi Idir donne l’impression qu’il nous recommande de conquérir notre propre montagne, de prendre notre envol, de se battre pour notre destin et de chercher à exceller. Il suit l’histoire de Monsieur Aznavour, un chanteur-compositeur qui est parti de la base et qui a suscité un enthousiasme pour surpasser. Comment donc ce garçon, fils d’immigrants arméniens, au physique moyen, de stature modeste et à la voix nasillarde, a-t-il pu se faire un nom dans la musique française ?
Le film montre que le succès d’Aznavour n’est pas le résultat de la chance, mais d’un travail acharné. Charles Aznavour (1924-2018) a travaillé tous les jours pendant dix-sept heures, avec une régularité remarquable. Malgré les évaluations négatives, il a persisté pour donner des spectacles même devant un public à demi remplitla salle. Avec beaucoup de courage et de talent, il a su conquérir Pierre Roche, un homme issu d’une bonne famille avec qui il a chanté en duo, et Edith Piaf. Ces collaborateurs de ses débuts lui ont ouvert les portes de la haute société.
Le film débute par des séquences documentaires du massacre des Arméniens qui eut lieu entre 1915 et 1916, et se termine par un bulletin de nouvelles présenté par Claire Chazal, spécialement tourné pour le film, qui aborde le parcours de ce fils de personnes apatrides devenu un symbole de la culture française. En ces temps où les idéologies xénophobes refont surface, son histoire mérite d’être rappelée. Le film contient toutefois un aspect politique explicitement présent qui s’appuie sur deux notions bien connues : une description succincte de la pauvreté familiale qui, malgré tout, se vit dans le bonheur, et le paradigme rassurant de l’intégration. Cette dualité est particulièrement évidente dans les scènes de la Seconde Guerre mondiale, où le sort du jeune Aznavour est comparé à celui des juifs, le tout accompagné d’une musique d’arrière-plan créant une ambiance de soulagement charmant.
Inlassablement insatisfait,
Chaque section du film porte le titre d’une chanson. Ce modèle simple mais efficace démontre à quel point la vie de l’artiste, ses difficultés, ses amours et ses rencontres, a influencé son travail. Sa chanson Les Deux Guitares, écrite à l’âge adulte, relate son enfance, tandis que La Bohème, créée dans les années 1960, raconte sa jeunesse, etc. Contrairement aux biopics qui se focalisent sur une période spécifique (Lee Miller, correspondante de guerre en 1939-1945, Back to Black, l’enregistrement de l’album légendaire d’Amy Winehouse), Monsieur Aznavour offre une vision chronologique de son parcours, depuis ses débuts jusqu’à ses derniers jours. Ce qui ressort ici, c’est la ténacité de cet homme insatiable, qui semble n’avoir jamais réalisé son rêve ultime, sauf lorsqu’il reçoit le même salaire que Frank Sinatra lors d’une tournée aux États-Unis.
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