« LE POINT DE VUE DU « MONDE » – INCONTOURNABLE
Un film peut parfois se pare d’une nuance spécifique, semblant être une marque spéciale de mise en scène ou une abstraction surpassant les mots. Dans All We Imagine as Light, le deuxième long métrage de Payal Kapadia, les tons de bleu cyan et de rouge magenta esquissent subtilement un portrait de la ville-éclat, Bombay, la métropole commerciale de l’Inde et le cœur vibrant de « Bollywood ». Chaque jour, des migrants viennent en masse, moins pour poursuivre un rêve que pour échapper à des traumatismes familiaux. Des voix off documentaires nous éclairent sur ces réalités dès le début du film.
Nous avions fait une première découverte de l’ardeur cinématographique de Payal Kapadia à Cannes, en 2021, lors de la Quinzaine des réalisateurs. Son œuvre, Toute une nuit sans savoir, entrelaçait une correspondance passionnée et militante, combinant une profusion d’images capturées par une jeunesse en opposition à l’autorité ultranationaliste hindoue de Narendra Modi.
Le calme apparent de All We Imagine as Light est trompeur : la manière délicate dont la réalisatrice capture la métropole, déguisée en un carrousel de fausses promesses, met en lumière ses protagonistes au beau milieu d’une foule d’inconnus. Le film commence avant l’aube, capturant l’animation de la ville qui se réveille tôt. La caméra plane délicatement au-dessus des stands d’un marché grossiste, capturant les vendeurs dissimulés dans l’ombre au pied des tours encore endormies.
« La saison des pluies et la saison sèche » »
Dans la distance, un éclairage horizontal indique le passage d’un train semblable à un métro suspendu. À bord, une femme portant un sari bleu tient fermement la barre comme si elle étant sur un carrousel. Plus tard, on la retrouve travaillant comme infirmière dans un hôpital. Son nom est Prabha (interprétée par Kani Kusruti), qui cohabite avec Anu (Divya Prabha). Anu, aperçue quelques étages plus bas, utilise sa chaise comme divertissement pour contrer l’ennui. Son stéthoscope révèle son désir amoureux ; elle l’emploie pour écouter les battements de son propre cœur.
Quand Anu retrouvera-t-elle Shiaz, son amoureux musulman que ses parents refusent d’accepter ? À une femme de 24 ans, mère de trois enfants et ne souhaitant pas en avoir d’autres, Prabha offre discrètement des pilules contraceptives. Elle mentionne que le gouvernement donne un seau et 1 000 roupies (environ dix euros), à tout homme qui subit une vasectomie, une procédure qui le rend stérile. Une autre personnage, Parvaty (interprétée par Chhaya Kadam), est l’employée de cuisine de l’hôpital où Prabha travaille. Le vieil édifice où elle demeure est en danger d’être détruit.
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