Catégories: Culture
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20 juin 2024 14 h 12 min

« Montanari: Le corps résiste à l’idéologie »

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Jean-Paul Montanari, âgé de 76 ans, dirige le festival Montpellier Danse depuis 1983. En tant que figure marquante de la chorégraphie contemporaine, il propose pour sa 44e et dernière édition un programme fort et attrayant qui met en valeur le travail d’auteurs tels que Wayne McGregor de Grande-Bretagne, Saburo Teshigawara du Japon et Angelin Preljocaj de France.

Lorsqu’on lui demande comment il a conçu cette 44ème édition, qui marque aussi son départ en tant que directeur du festival, il révèle son désir de se recentrer sur la création et de soutenir les artistes, dont les besoins sont de plus en plus grands. Montanari souligne que Montpellier est l’un des rares lieux où la coproduction d’œuvres est toujours massive. Cette édition se caractérise principalement par les créations d’artistes. Il compare le processus créatif à la recherche médicale : l’artiste explore l’inconnu et invente de nouvelles manières de se mouvoir et de s’exprimer dans l’espace. Il admet avoir souvent cherché a l’étranger, arguant que son travail se concentre sur l’écriture, de moins en moins visible chez nous.

Montanari précise que cette édition est marquée par un cosmopolitisme, s’alimentant des influences de diverses cultures. Il cite trois villes – Marrakech au Maroc, Tel-Aviv en Israël et Montréal au Canada – comme ses lieux récurrents pour se ressourcer et dénicher de nouveaux talents. Il confesse, cependant, qu’il a l’impression de concevoir toujours un festival qui reste ressemblant à ceux des éditions précédentes.

Enfin, on remarque l’absence d’images sur les affiches annonçant cette édition, mais aucune raison n’est donnée pour expliquer ce choix.

J’ai conçu ce programme avec mon équipe dans une mentalité légèrement différente. Comment pouvons-nous fonctionner normalement alors que la guerre est à nos portes? Nous assistons à une diminution de l’influence de l’Occident et de la démocratie. La danse contemporaine, qui est une création occidentale, perd également son essence pour faire place à une esthétique mondialisée à l’image de TikTok, cette diabolique invention chinoise. Ainsi, il n’y a pas d’image pour cette édition. Juste de sombres lettres sur un fond blanc pour exprimer notre deuil.

Quelles sont, à votre avis, les caractéristiques de la scène chorégraphique actuelle ? Les réseaux sociaux ont-ils vraiment transformé l’art?

Ce que nous avons nommé la « danse contemporaine » depuis les années 1980 n’existe plus. Son histoire touche à sa fin. Je compare cela au Nouveau Roman, qui a inventé une nouvelle façon d’écrire avant de se vider. Depuis, nous sommes revenus à une forme plus classique, à la Zola, avec l’introduction du style journalistique dans la littérature. L’esthétique que nous voyons sur les réseaux sociaux, qui se concentrent sur l’agrément, le convivial, l’ambiance club et dance floor, est destructrice. Le geste, à l’origine intimiste est devenu extériorisé. C’est probablement le coût de la popularisation de la danse. De nos jours, 90% des productions sont des spectacles de distraction, avec l’aide de certains médias et réseaux sociaux, ces fléaux de notre époque. Les politiques, d’ailleurs, sont friands de ces intrusions aisées et gratuites dans les rues. Pourquoi pas ! Cependant, ces animations appauvrissent les budgets de recherche. Et la danse « érudite » tend à diminuer…

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