Claire Tancons, originaire de la Guadeloupe et âgée de 47 ans, a vécu plusieurs années à l’étranger, notamment en Allemagne et aux États-Unis. En tant que chercheuse, critique d’art et conservatrice, elle a collaboré à plusieurs grandes expositions internationales, telles que celles de la Nouvelle-Orléans, de Gwangju en Corée du Sud, et de Chardja aux Émirats arabes unis. Cette année, elle est responsable de la 23e édition de la Nuit Blanche, un événement qui met en lumière les œuvres artistiques des régions d’outre-mer.
La Nuit blanche de cette année se concentre sur les œuvres d’artistes d’outre-mer. Etait-ce une décision de la mairie de Paris ou était-ce votre propre idée ?
Quand on m’a contactée il y a un an, le thème n’était pas encore déterminé. Cependant, la mairie de Paris voulait déjà valoriser l’aspect mondial de la France, en prévision des Jeux Olympiques. J’ai alors suggéré un projet qui pourrait susciter une réflexion plutôt que simplement célébrer la diversité. Il faut noter que bien que le sujet de la colonisation ne soit pas explicitement abordé, il reste un thème sous-jacent.
Par ailleurs, les termes « outre-mer » et « ultramarin », qui apparaissent fréquemment dans le programme, sont remis en cause par plusieurs intellectuels…
Oui, le terme non seulement fait référence à l’ancien empire colonial français, mais à partir de Papeete, outre-mer signifie évidemment Paris! J’essaie de l’éviter au maximum. Dans mon éditorial de la Nuit blanche, je préfère utiliser le terme « France polygonale ». C’est une référence géographique et un jeu de mots par rapport à la France hexagonale, pour envisager la France au-delà de l’Hexagone. André Delpuech m’a suggéré cette expression, qui a longtemps été responsable des collections des Amériques au Musée du quai Branly à Paris, et a développé le département d’archéologie coloniale en Guadeloupe. J’ai adopté cette expression car je la trouve utile pour ouvrir notre perspective et décrire les artistes ou les productions provenant de zones très différentes, de l’océan Pacifique, de l’océan Atlantique, de l’océan Indien. Car le défi est de trouver un terme commun.
Cette Nuit blanche vise principalement à recentrer les perspectives sur la France. Dans quelle mesure les douze territoires d’outre-mer y sont-ils intégrés ?
En reconnaissant que l’identité française inclut l’être polynésien, guadeloupéen et mahorais, il est important que nous en ayons conscience depuis l’Hexagone. Pour célébrer la complexité polyédrique de la France, nous avons encouragé plusieurs régions à organiser leur propre « Nuit blanche. » À un certain moment, j’avais envisagé de commencer la « Nuit blanche » à Paris à 10 heures du matin, correspondant à 19 heures en Nouvelle-Calédonie. Cependant, pour des raisons principalement logistiques et financières, cela n’était pas réalisable. Malgré tout, la « Nuit blanche » de cette année débutera une heure plus tôt, à 18 heures à Paris, qui correspondera à 19 heures à Mayotte, le lieu qui a inspiré le film « Koropa » (2016) de l’artiste Laura Henno, qui sera projeté au parc de Belleville.
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