La réceptionniste, surprise, élargit ses yeux et demande à nouveau : « Qui êtes-vous censé rencontrer ? » « Karl Sanchez. » Non, cela ne lui évoque rien. Son collègue lui vient en aide et lui murmure avec un léger sourire : « C’est Nicky… » Son visage éclaire immédiatement. « Bien sûr ! Je l’appellerai tout de suite. » Fraîchement débarqué de New York, où il réside, Karl Sanchez, mieux connu sous son pseudonyme de drag queen « Nicky Doll », semble en excellente forme. Il ne semble pas affecté par le décalage horaire. « Je m’y suis habitué maintenant ! » On le retrouve dans un salon privé d’un hôtel situé dans le 11e arrondissement de Paris. Comme c’est Nicky Doll qui est la vedette, on convient de mener l’interview principalement au féminin.
La présentatrice flamboyante et juge de « Drag Race France » (version française de l’émission de téléréalité américaine « RuPaul’s Drag Race ») est en visite dans son pays d’origine à la fin avril pour la conférence de presse annonçant la saison 3, dont le premier épisode sera diffusé sur France 2 et France.tv le vendredi 31 mai. Selon France Télévisions, les deux premières saisons du concours de drag queens, remportées par Paloma puis Keiona, ont attiré respectivement 7 millions et 11,2 millions de téléspectateurs.
Nicky Doll, âgée de 33 ans, a connu une ascension fulgurante et surprenante qui l’a propulsée du rôle de grande soeur de la scène drag française à celui de reine suprême, voire de mère protectrice. « Je suis extrêmement fière de déclarer que toutes les drag queens ayant participé à l’émission vivent désormais de leur art », dit-elle, mentionnant notamment les carrières de La Grande Dame (finaliste de « RuPaul’s Drag Race : UK v. The World »), Piche (ambassadrice du rap queer français) et Lolita Banana (animatrice de la franchise « Drag Race Mexico »). « C’est incroyable ! » se réjouit Nicky Doll. Surtout quand on considère le chemin qu’elle a parcouru.
Le mouvement drag a émergé de la contre-culture queer vers 1870. À la fin des années 2010, en France, les drag queens ont commencé à quitter les clubs gays et à gagner en visibilité. Au cours de l’été 2022, les divas extravagantes de la saison 1 de « Drag Race » ont réussi à séduire un public bien au-delà du cercle LGBT+.
Surnommée « Jeanne d’Arc du drag », Nicky Doll a dû franchir de nombreux obstacles pour se faire un nom. En 2020, alors qu’elle réside déjà aux États-Unis, elle devient la première « frenchie » à participer à « RuPaul’s Drag Race » (saison 12). Etiquetée comme la « fashion queen » par les spectateurs américains, Nicky Doll, qui est également maquilleuse de profession, a multiplié les hommages vestimentaires aux grands créateurs de mode français (Christian Dior, Azzedine Alaïa…). Cependant, la barrière linguistique et un manque de confiance en soi l’ont empêchée de démontrer pleinement son talent. Elle a finalement été éliminée lors du cinquième épisode. Il reste 63,67% de cet article à lire, l’accès à la suite est réservé aux abonnés.
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