Ayant rejoins la danse le lundi 20 mai, grâce au séduisant duo féminin andalou Adios Amores et leur charmant morceau pop « Volvereis », « Septembre sans attendre » de Jonas Trueba est jusqu’à présent le film le plus impressionnant vu à la Quinzaine des cinéastes. Assis parmi des réalisateurs renommés tels que Rodrigo Sorogoyen, Jaime Rosales, José Luis Guerin et Albert Serra, Trueba fait partie de cette vague d’artistes innovants qui font rayonner le cinéma d’auteur espagnol contemporain sous l’ombre immense de Pedro Almodovar. Le réalisateur âgé de 42 ans est célèbre pour expliquer une veine sentimentale et personnel, « rohmérienne », qui le distingue comme le « français » parmi les cinéastes espagnols. Un facteur qui contribue sans doute à son succès en France, bien que toujours un peu restreint, depuis les quatre dernières années.
Ses films illustrent divers tableaux de vie: une jeune femme qui déambule librement à travers l’été madrilène rencontrant différentes personnes (Eva en août, 2020); un groupe d’adolescents de la ville à qui on a suivis sur une période de cinq ans dans un projet de cinéma collectif (le documentaire Qui à part nous, 2022); la réunion de deux couples après la pandémie pour découvrir le concept urbain de la campagne (Venez voir, 2023). Pour mieux comprendre Trueba, il faut mentionner la complicité réelle qu’il partage avec Itsaso Arana. Arana est une actrice Navarraise énergique qui a joué dans presque tous les films de Trueba et a collaboré avec lui pour la rédaction de certains scénarios. En 2022, elle a également tenté sa chance avec la réalisation avec le film « Les filles vont bien ».
Dans le scénario écrit par Trueba et Arana, les rôles sont repris en septembre avec un ajout majeur, celui de l’acteur Vito Sanz. C’est une preuve du pouvoir d’un cinéma d’auteur qui ne s’impose pas, qui se base sur l’expérience de chaque individu pour créer la trame de son histoire et nourrir les émotions qui l’animent. Ici, il s’agit d’une comédie de remariage – un sous-genre mis en lumière et analysé de manière brillante par le philosophe Stanley Cavell dans son ouvrage A la recherche du bonheur. Hollywood et la comédie du remariage (Vrin, 2017), que le film s’amuse à mettre en avant. En effet, Trueba, comme Rohmer, est un réalisateur qui joue avec les signes, tantôt révélant des secrets, tantôt induisant en erreur. Le couple formé par ce puissant duo d’acteurs est incarné par Ale (Itsaso Arana) et Alex (Vito Sanz). Deux surnoms qui, mis à part le « x », indiquent leur proximité.
C’est cependant Ale qui prend les commandes ici, tandis qu’Alex, qui semble moins sûr de lui, navigue à vue en pleine tempête. Le plan d’ouverture nous fait comprendre qu’il y a de quoi. Lors d’une chaude nuit madrilène, les amants se languissent. Leur désir semble épuisé, ils gèrent leur rupture discrètement. Trueba, avec sa subtilité habituelle, transforme cette situation en argument comique – la préoccupation des amants semble plus concentrée sur les implications sociales et matérielles que sur son impact personnel. Du moins, c’est ce qu’ils laissent paraître, aidés par leur fierté et leur stratégie.
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