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« Neuvième de Beethoven: Retrospective Politisée sur Arte »

C’est une évidence que la chaîne franco-allemande Arte rend hommage à la 9ème Symphonie de Ludwig van Beethoven (1770-1827), qui a été créée précisément il y a deux siècles, le 7 mai 1824. Le musicien Allemand avait été un fervent croyant des idéaux de la Révolution française et des Lumières, avant de devenir un symbole national allemand et européen transcendé.

Dans ce but, Arte présente un documentaire d’une heure et vingt minutes, très rare pour un sujet de musique classique, appelé « La Neuvième de Beethoven. 200e anniversaire » en début de soirée. Carmen Traudes, la réalisatrice du film, revisite la création de cette masterpiece et de son fameux finale « Ode à la joie », basé sur un texte de Friedrich von Schiller (1759-1805).

Pour la deuxième partie de la soirée, un performance de la Neuvième est organisée avec quatre ensembles européens: l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig sous la direction de Andris Nelsons; l’Orchestre de Paris et Klaus Mäkelä; l’Orchestre du Théâtre de la Scala de Milan et Riccardo Chailly; le Chœur de l’Académie de chant de Vienne, l’Orchestre symphonique de Vienne et Petr Popelka qui remplace Joana Mallwitz qui a du annuler pour des problèmes de santé. « Surfe sur la vague »

Dans le film, les directeurs d’orchestre, les universitaires, les musicologues et les historiens participent et éclaircissent plusieurs faits historiques. Dans ce documentaire détaillé (et tout de même facile à comprendre), ils dissolvent certains mythes reliés au compositeur et à sa dernière symphonie. Par exemple, ils expliquent comment Beethoven, malgré ses aspirations révolutionnaires, est resté un musicien de cour, dépendant financièrement de la noblesse. Ils décortiquent comment il a « attrapé la vague », comme le musicologue Ulrich Konrad l’explique, lorsqu’il a choisi un poème déjà maintes fois repris en musique.

Selon son collègue Mathieu Schneider, cette œuvre qui semble révolutionnaire suit en réalité les normes connues du public de l’époque, menant à l’adoption rapide de la Neuvième. Schneider pense que le mythe de Beethoven a pris forme lorsque Richard Wagner, qui avait également des idéaux révolutionnaires, l’a déclaré comme l' »évangile humain de l’art futur ». En 1876, lors de l’inauguration du Palais des Festivals de Bayreuth, Wagner dirigea la Neuvième, qui est la seule œuvre non-Wagnérienne qui y fut jouée.

Bien que Mathieu Schneider considère l’œuvre comme « une symphonie de joie » plutôt que « une symphonie politique », le film démontre comment ces mêmes politiques ont utilisé l’œuvre à leurs fins.

L’hymne européen.

La mélodie qui « engendre une telle unité collective risque d’être détournée », prévient la chef d’orchestre Joana Mallwitz. En fait, l’accession des nazis au pouvoir a causé des problèmes : le final de la symphonie du « grand héros du peuple allemand », selon Adolf Hitler (qui ne se souciait pas du fait que ce « héros » avait prôné l’amitié et l’égalité entre les peuples), a été utilisé comme hymne olympique lors des Jeux de Berlin en 1936.

Les Soviétiques ont trouvé l' »Ode à la joie » assez stimulante pour l’utiliser à outrance. Il est à noter que Dmitri Chostakovitch (1906-1975), malgré le fait qu’il ait eu le courage d’écrire plus que les neuf symphonies fatidiques (il en a écrit quinze au total), a fait de sa propre Neuvième (1945), une oeuvre concise et légère, une sorte de défi lancé à Beethoven et à Staline. Cela a déplu au Vojd (équivalent russe de « führer »), qui espérait un hommage « béthovénien » en son honneur…

Récupérée à la fois par des mouvements d’ultragauche et des régimes d’extrême droite, désacralisée par les artistes rebelles (comme Mauricio Kagel) au moment du bicentenaire de la naissance de Beethoven, l' »Ode à la joie » a retrouvé son impartialité quand le Conseil de l’Europe l’a fait l’hymne européen en 1972. Cependant, un détail est à noter : Herbert von Karajan, ancien membre du parti nazi, avait insisté pour percevoir des droits d’auteur sur « son arrangement »…

Enfin, un autre ajustement symbolique a été rappelé – Leonard Bernstein a dirigé la neuvième symphonie pour célébrer la chute du mur de Berlin en 1989, remplaçant le mot « Freiheit » (« Liberté ») par « Freude » (« Joie »). Cependant, le musicien américain ne faisait que suivre les pas de Beethoven, qui avait lui aussi modifié et adapté le texte du « poète de la joie ».
Il s’agit du documentaire « La neuvième de Beethoven. 200e anniversaire », réalisé par Carmen Traudes (Allemagne, 2024, 80 min), disponible sur Arte.tv jusqu’au 6 juin 2024. De plus, la « symphonie n° 9 » de Ludwig van Beethoven sera diffusée en léger différé de Leipzig, Paris, Milan et Vienne sur Arte.tv jusqu’au 5 mai 2025.

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