Catégories: Culture
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17 avril 2024 4 h 06 min

« Sonia Kronlund traque l’Homme aux mille visages »

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Le verdict du « Monde » est clair – c’est un événement à ne pas rater. Sonia Kronlund, reconnue depuis deux décennies pour son travail sur l’émission « Les Pieds sur terre » diffusée sur France Culture, a su captiver son public de l’heure du déjeuner avec des reportages sans commentaire. Sa voix calmante et intense guide chaque épisode, transmettant les histoires depuis les confins de l’ether radiophonique.

La nouveauté qu’elle nous propose est un documentaire qui risque de ne pas laisser ses auditeurs indifférents. Ils se demanderont sans doute comment et pourquoi elle choisit parmi les nombreux sujets fascinants et personnages intrigants qu’elle rencontre, ceux qui méritent d’être mis en lumière dans un documentaire.

La journaliste nous donne un aperçu de la réponse dans le premier chapitre de « L’Homme aux mille visages ». Elle révèle comment ses aventures sentimentales ont été parsemées de rencontres avec des séducteurs mythomanes. D’ailleurs, son documentaire de 2017, « Nothingwood », suivait le parcours de Salim Shaheen, un cinéaste afghan et conteur inoubliable, qui embellissait chaque moment de sa vie avec un zeste de fiction.

« L’Homme aux mille visages » explore le côté sombre de ce talent. Il retrace l’histoire d’un imposteur nuisible qui n’exagère rien, mais cause du tort à de nombreux individus.

Après cinq ans d’enquête, Sonia Kronlund présente « Ricardo », un imposteur incroyable qui a charmé d’innombrables femmes à travers le monde en changeant constamment d’identité. Il se présente parfois comme Ricardo, Alexandre, Daniel ou Richard. Il prétend tour à tour être médecin, policier, photographe, ingénieur et affirme être originaire du Brésil, du Portugal ou de l’Argentine. Doté d’un don stupéfiant d’omniprésence, l’homme réussit à entretenir plusieurs liaisons sérieuses simultanément, de la Pologne au Brésil en passant par la France.

C’est une exploration du masochisme amoureux.

Sonia Kronlund a réussi à retrouver les victimes de Ricardo. Certaines d’entre elles ne craignent pas de témoigner à visage ouvert, tandis que d’autres sont représentées par des actrices (il est d’ailleurs impossible de distinguer la réalité de la fiction) : ces femmes, pas plus naïves que d’autres, qui se sont retrouvées amoureuses, voire engagées, sans jamais se douter qu’elles partageaient leur existence avec un homme aux multiples visages et identités, parvenant à rester toujours sous le radar. L’une d’elles se rappelle que Ricardo lui reprochait de ne jamais avoir voulu se rendre sur son lieu de travail – si seulement elle avait accepté!
Le film aurait pu réciter sérieusement leurs témoignages face à la caméra et montrer les visages désespérés des victimes. Mais plutôt, le film adopte une approche humoristique et distante, lui donnant ainsi une dimension curative : une discussion avec une avocate sur les risques associés à la révélation de l’identité de Ricardo (Sonia Kronlund fait preuve d’audace en le révélant finalement), les femmes témoignent dans un Paris idyllique accompagné de couples amoureux, se vaccinant définitivement contre toutes illusions romantiques.
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