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« 1941: Dernier Bateau Pour l’Exil »

« DOCUMENTAIRE – DIMANCHE 14 AVRIL À 22 H 40 SUR FRANCE 5
En 1940, aux abords du Vieux-Port de Marseille, se rassemblent des centaines de réfugiés en fin d’année. Parmi eux, des opposants au régime nazi, des artistes, des intellectuels et des Juifs cherchant désespérément à fuir la France de Vichy pour rejoindre la ville de New York ou l’Amérique du Sud. Pour y parvenir, ils passent par la liaison maritime Marseille-Fort-de-France, opérationnelle de décembre 1940 à mai 1941. Germaine Krull, photographe (1897-1985), compare alors Marseille à une foire immense où l’entraide s’entremêle à la débrouillardise la plus douteuse. Soma Morgenstern, journaliste (1890-1976), se montre plus sombre et décrit un Marseille où sont chassés non pas des bêtes mais des hommes : Juifs, Tchèques, Polonais, Autrichiens. Selon lui, les « rabatteurs » sont des policiers, des employés de bureau. Bien qu’ouverte seulement pendant quelques mois, cette liaison maritime permet au régime de Vichy de garder contact avec son « joyau des Antilles », tout en se délestant de milliers de « non désirables ». Près de 5 000 d’entre eux réussissent à embarquer à bord du Winnipeg, du Capitaine-Paul-Lemerle, du Wyoming ou du Mont-Viso après avoir franchi de multiples obstacles. »

Dans l’attente de leur départ de Marseille, des « indésirables » ont trouvé refuge dans des hôtels coûteux, ont réussi à échapper à la surveillance de la police de Vichy et ont tenté en vain d’obtenir les innombrables permissions requises pour embarquer. Parmi eux se trouvaient des personnalités telles que l’ethnologue Claude Lévi-Strauss (1908-2009), les photographes Germaine Krull et Lore Krüger (1914-2009), l’éditeur Jacques Schiffrin (1892-1950), et les auteurs André Breton (1896-1966) et Anna Seghers (1900-1983) pour en nommer quelques-uns.

Le film de Jérôme Prieur raconte leur périple depuis le port de Marseille jusqu’aux camps d’internement du Lazaret et de Balata en Martinique, en passant par les trente jours de voyage en mer. Prieur, qui a réalisé avec succès des documentaires sur cette époque, dont « Darlan. Le troisième homme de Vichy » et « Vivre dans l’Allemagne en guerre », n’a pas pu utiliser d’images filmées par les protagonistes pour la simple raison qu’il n’en existait pas.

Cependant, le cinéaste a utilisé plusieurs photos prises pendant le long voyage ou en Martinique (principalement par Germaine Krull, Ilse Bing et Dyno Lowenstein) ainsi que des films amateurs tournés lors de voyages avant la guerre et dans les rues de Marseille en 1940 et 1941.

Dans une œuvre musicale créée par Marc-Olivier Dupin, le réalisateur Jérôme Prieur incorpore de multiples passages de correspondance écrite par les passagers lettrés lors de leur périple. De moments de tristesse à ceux d’ennui, en passant par des détails intimes (la proximité à bord, les conditions d’emprisonnement aux Antilles), à leurs espoirs, tout est inclus. « J’ai imaginé ce film comme une chronique d’événements, comme le journal de ces émigrants, pour partager leur expérience », souligne le réalisateur.

Le produit final est convaincant. On se laisse transporter par ce périple qui conduit ces réfugiés à vivre l’anxiété à Marseille, l’ennui en mer, le scepticisme dans les deux camps de la Martinique. Avant de s’embarquer, enfin, pour une nouvelle existence. Certains d’entre eux se dirigent vers New York comme prévu, tandis que d’autres se rendent à Cuba, au Mexique, au Brésil, à Buenos Aires, ou à Caracas. Ils espèrent tous revoir un jour l’Europe qu’ils ont quittée, loin de Pétain.

Jérôme Prieur raconte ceci dans son documentaire « 1941. Dernier bateau pour l’exil » (France, 2023, 55 min). Le film a été présenté sur France 5 dans l’émission « La Case du siècle » et il est accessible en replay sur France.tv.

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