Connu pour son travail en tant qu’historien et chercheur, Vincent Duclert a occupé le poste de directeur du Centre Raymond-Aron. Il est reconnu comme un expert des engagements intellectuels et des sociétés démocratiques, et a écrit des biographies sur des personnalités influentes comme le capitaine Dreyfus, Jaurès et Albert Camus. Il a également accompli une édition critique de « La Vérité en marche. Émile Zola » pour les éditions Tallandier, qui a été révisée et actualisée en 2021.
Émile Zola, qui a vécu de 1840 à 1902, est un écrivain renommé qui, tout comme Balzac, Flaubert et Maupassant, offre une réflexion à ses contemporains en dépeignant la société telle qu’elle est véritablement. Cependant, Zola diffère de ces auteurs car il est reconnu comme un homme qui s’implique activement, indigné et prêt à contester les normes, à travers ses œuvres telles que Germinal, La Curée et L’Argent, mais aussi par ses prises de position publiques, notamment pendant l’affaire Dreyfus. Il serait donc légitime de le considérer comme l’un des premiers intellectuels du XXe siècle, à l’image de Camus, Sartre ou Malraux.
Duclert soutient ce point de vue et il nous invite à faire une analyse historique afin de comprendre et d’apprécier le rôle de Zola dans l’émergence de la figure de l’intellectuel. Il est important de souligner que, contrairement aux célèbres écrivains et philosophes engagés des XVIIIe et XIXe siècles, l’intellectuel du XXe siècle fait partie d’un mouvement collectif et d’une pensée politique qui découle de l’utilisation des connaissances, comme l’a démontré sa thèse sur l’engagement des savants lors de l’affaire Dreyfus.
Bien que Émile Zola soit le seul signataire de sa lettre adressée au président de la République, publiée dans L’Aurore sous le célèbre titre « J’accuse…! » le 13 janvier 1898, c’est une illustration claire de sa politisation et socialisation. Georges Clemenceau lui a donné ce titre renommé. Zola passe de la simple dénonciation littéraire des injustices et atrocités de la société bourgeoise à un engagement civique actif pour la défense des droits de l’homme et du citoyen, qui constituent l’idéal républicain. Son discours est intensément politique, reflétant les qualités et les convictions essentielles à une société démocratique. Cette information est extraite de l’édition spéciale de Le Monde « Une vie, une œuvre : Émile Zola », de mars 2024, disponible dans les kiosques et en ligne sur notre site de vente.
Les accusations non fondées contre le capitaine Dreyfus, qui est innocent du crime de haute trahison (envers l’Allemagne), consituent une violation grave de ses droits. Dreyfus, d’origine juive et un officier progressiste, a été condamné avant même son proces, ce qui soulève des questions d’antisémitisme et de traitement arbitraire. Les instancs responsables de ce verdict du 22 décembre 1894, qui a conduit à des sanctions sévères à son encontre – comme la déportation continue en fortification et la dégradation publique -, ont porté atteinte à l’état de droit. En outre, ces actes ont sérieusement compromis les institutions militaire, judiciaire, policière et le gouvernement, et ont instauré un climat de persécution à l’encontre de ceux qui auraient le courage de protester. Pendant ce temps, le véritable coupable, le commandant Esterhazy, a été protégé et a obtenue son aquittement lors d’un conseil de guerre, en dépit des preuves concrètes présentées publiquement par les défenseurs de Dreyfus (connus sous le nom des « dreyfusards ») et par le chef du contre-espionnage, le lieutenant-colonel Picquart. Ce dernier a été emprisonné le jour même où « J’Accuse… ! » a été publié. Cet article n’est pas terminé et il reste encore 86.83% à lire – l’accès à la suite est réservé aux abonnés.
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