L’expression artistique la plus moderne d’Annette Messager, née en 1943, remplit tous les secteurs de la galerie Marian Goodman à Paris, y compris les sous-sols. Si ces espaces étaient encore plus grands, elle aurait facilement réussi à les exploiter. En entrant dans la galerie, on s’émerveille de la remarquable inventivité de l’artiste qui, plus de cinquante ans après ses débuts, n’a aucun mal à étonner et innover grâce à l’association de matériaux et techniques qu’elle avait jusqu’ici utilisés indépendamment.
L’exposition met en avant le mariage entre le dessin et la sculpture. Pour cette dernière, Annette Messager pratique la taille dans un type de mousse noire dense, assemble les différents éléments et les recouvre d’un tissu rigide de couleur noire. Elle crée ainsi des représentations humaines stylisées géométriquement, et plus rarement, des illustrations précises telles qu’un crâne, un corbeau ou un escargot. Ces figures sont fixées au mur avec des fils noirs, du sol au plafond.
Entre ces figures, elle dispose des œuvres sur papier de différentes tailles, certaines étant très longues. C’est ainsi qu’elle a créé l’ensemble monumental « En même temps 2 » (2021), une frise dansante composée de soixante-dix figures, et des compositions de moindre taille, dont une qui est sans aucun doute un chef-d’œuvre : « Le Dé de la Passion » (2022). L’artiste revisite le sujet de la crucifixion et ce qui était autrefois appelé Arma Christi, les instruments de la Passion : lance, éponge ou dés. Le thème de la mort y est central.
L’interaction des deux formes artistiques se produit parfois à travers les entrelacements d’un réseau noir. Ce filet enveloppe les sculptures et crée pour les dessins une couverture qui tombe jusqu’au sol. C’est ce qui se passe avec « Iconic » (2022), une œuvre qui reprend ironiquement les images « iconiques » du 20ème siècle, telles qu’Einstein, Che Guevara, Marilyn, la fillette vietnamienne brûlée au napalm et l’exploration spatiale, dans un collage confus à l’image de l’époque. Dans un autre cas, Annette Messager sculpte à l’aide des lettres pour former le mot « Ghost » (2017) – « fantôme ».
En effet, la mort est omniprésente, oscillant entre le tragique et le burlesque, l’horreur et la moquerie, les disparitions et les apparitions. C’est le thème dominant des dessins acryliques accrochés en croix, en damier ou individuellement. Ils rassemblent des créatures hybrides ou abréviées, des métamorphoses anatomiques, beaucoup de crânes et quelques symboles. Ils pourraient être exposés aux côtés de Goya ou de Picasso, parvenant à une simplicité époustouflante.
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