Dès 1927, Daumal, en compagnie de Roger Gilbert-Lecomte et de Roger Vailland crée « Le Grand Jeu ».
Seuls trois numéros paraîtront en raison de tensions nées au sein du groupe, principalement autour de la figure d’André Rolland de Renéville.
Dans ce dernier numéro, Daumal publie un article hautement symbolique : « Nerval le nyctalope ».
Symbolique parce que Nerval sera toujours pour lui, comme d’ailleurs pour Gilbert-Lecomte et Rolland de Renéville, un auteur de prédilection qu’il ne cessera d’interroger.
Symbolique encore parce que Daumal y relate son expérience des univers parallèles, expérience faite en compagnie de Robert Meyrat, à qui est dédié ce texte : la sortie de son corps pour atteindre son « Mont Analogue ».
Il y publie aussi son admirable « Lettre ouverte à André Breton », laquelle met en évidence ce qui sépare le Grand Jeu du surréalisme et se termine par cette mise en garde prophétique : « Prenez garde, André Breton, de figurer plus tard dans les manuels d’histoire littéraire ».
Des dissensions au sein du groupe le firent éclater en 1932.
Dès lors, René Daumal poursuit sa quête, publiant de très nombreux textes dans les principales revues de l’époque, mais peu d’ouvrages : un recueil poétique, » Le Contre-Ciel » (1936), et « La Grande Beuverie » (1939).
Pour subsister, mais aussi par passion en ce qui concerne le sanskrit, il s’attelle à des travaux de traduction : Hemingway, « Essai sur le bouddhisme zen » de D.
T.
Suzuki, « L’Enseignement de Ramakrishna », ou encore des textes de Shri Aurobindo.
De nombreuses traductions du sanskrit ainsi que des essais sur la pensée hindoue ont été regroupées dans « Bharata » (1970).
Malade, René Daumal aura passé ses dernières années à tenter en vain d’achever ce que l’on considère généralement comme son chef-d’œuvre, » Le Mont Analogue », (posthume, 1952) « roman d’aventures symboliquement authentiques », dédié à A.
de Salzmann.
Ce Mont n’est autre que la voie qui unit la terre au ciel, et « qui doit matériellement, humainement exister, sans quoi notre situation serait sans espoir ».
Ce récit inachevé rejoint tous les mythes, de la philosophie indienne à la mystique rhénane, il condense en quelques pages l’art d’un écrivain résolument inclassable.
Laisser un commentaire