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« Michael Spyres triomphe à l’Opéra Bastille »

Lydia Steier, la metteure en scène de la nouvelle production de La Vestale de Spontini à Paris jusqu’au 11 juillet, s’inquiète de ce que les gens à Paris puissent la voir comme une perverse assoiffée de sang. Cette crainte est justifiée : par coïncidence du calendrier, cette reprise de l’opéra le plus célèbre du compositeur italien, qui n’avait pas été jouée dans sa version originale à l’Opéra de Paris depuis 1854, coïncide avec la représentation de Salomé de Richard Strauss en 2022, dirigée par l’artiste américaine aux tendances sadiques et érotomanes.

Cette fois, l’orgie décadente, les meurtres sexuels et les parties sexuelles ne sont plus au programme, mais il reste un défilé de brutalités et de corps démembrementés, des scènes de torture et d’humiliation, d’exécutions promptes. La cruelle fille d’Hérodiade a profané l’ordre du monde en demandant la tête prophétique de Jean-Baptiste sur un plateau d’argent, tandis que la prêtresse Julia violera ses vœux de vierge sacrée en recevant les hommages de Licinius, son ancien amour, au sein du temple sacré de la déesse Vesta.

Lydia Steier exploitait l’excès expressionniste de l’opéra de Strauss pour nourrir une débandade visuelle. Cependant, cela ne se retrouve pas dans La Vestale, dont le style néo-classique, légèrement académique malgré certaines beautés indéniables, est réticent à supporter le fardeau d’une accusation de fanatisme religieux doublée d’une attaque contre la tyrannie. Les images sont inspirées par La Servante écarlate (où le rouge a tourné au noir), les femmes objectifiées du roman de Margaret Atwood trouvant une comparaison appropriée dans ces vestales romaines vouées à la pureté et à l’abstinence.

Amoureux glorieux et tourmenté

Le décor est une imitation de l’immense amphithéâtre délabré de la Sorbonne, où les livres – symboles du savoir et de la culture assujettis à l’autodafé – alimentent la flamme de la déesse du foyer dans la religion romaine. De temps à autre, un grand mur de béton ferme la scène, symbolisant un monde sans futur ni perspectives où les récalcitrants sont pendus ; les dissidents sont confrontés à la mise en scène ou à la mort. Les défilés militaires impressionnants d’un côté, les processions rituelles avec reliques, icônes, chars et effigies de l’autre : tant les mouvements de masse que la direction des acteurs, se conforment parfaitement au cadre, invitant parfois, de façon inattendue, au ridicule qui a le mérite de délivrer de l’ennui.

Lors de la projection anticipée exclusivement pour la jeunesse le 12 juin, Elza van den Heever, qui a depuis cédé sa place à Elodie Hache depuis la première du 15 juin, a incarné une Julia intensément passionnée et touchante, présentant un chant parfaitement formé sur toute la gamme bien que légèrement tendu dans les notes aiguës. Une observation identique s’applique à Grande Vestale d’Eve-Maud Hubeaux, dont le mezzo sensuel donne une profondeur notable à la liaison érotico-sadique qu’elle a avec sa « fille » et le Souverain Pontife de Jean Teitgen, dont la force inébranlable et la coloration de voix unique font forte impression.
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